Revue de presse · 26 avr. 2010 à 08:24
L'attentat de Karachi, qui avait fait quatorze morts en 2002 dont onze français, a-t-il un lien avec le financement de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995 ? L'affaire est complexe : en 1994, la France signe un contrat d'armement avec le Pakistan. A cette occasion, la France aurait versé des commissions occultes, dont une partie serait revenue (principe des rétro-commissions) à plusieurs intermédiaires français.
En 1995, quand Jacques Chirac arrive au pouvoir, le nouveau Président de la République décide de suspendre le versement de ces commissions au Pakistan. Et, selon Libération, un deuxième flux de commissions s'arrête en 2001, un an avant l'attentat de Karachi. Pourquoi Chirac a-t-il interrompu ces versements ? Car ces rétro-commissions auraient servi à financer en partie la campagne présidentielle de Balladur en 1995. C'est la piste suivie par la justice depuis quelques mois dans le cadre de l'attentat de Karachi, qui serait ainsi une forme de représailles sur fond de commissions occultes non versées.
Edouard Balladur a toujours nié toute malversation.
Mais en ce lundi 26 avril 2010, Libération publie des documents bancaires montrant que des intermédiaires imposés par l'ancien Premier ministre ont bien perçu des commissions liées au contrat d'armement signé avec le Pakistan en 1994.
Selon Libération, "des documents inédits démontrent que deux intermédiaires imposés par les balladuriens ont au moins reçu 54 millions de francs, le 2 juin 1995, dans le cadre d'un accord prévoyant le versement global de 216 millions de francs sur douze mois. Un pactole susceptible d'avoir alimenté des flux de rétro commissions illégales, alors que les deux hommes n'ont joué aucun rôle dans les négociations commerciales menées pour vendre ces sous-marins. Dans le même temps, Libération explique que le compte de campagne de Balladur a enregistré un dépôt en espèces suspect de 10 millions de francs. Tout cela alors que Nicolas Sarkozy était à la fois le porte-parole de l'ex-Premier ministre et le ministre du Budget".
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"La campagne de Balladur a bénéficié d'importants dons suspects" avance Libération. Selon le quotidien, le compte de campagne de Balladur qui avait été ouvert par l'Aficeb, l'Association pour le financement de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur, indique la présence d'un versement de 10 millions de francs en liquide le 26 avril 1995 "sans justificatif sérieux".
"Sur le bordereau bancaire, il a été mentionné que l'argent provenait de collectes effectuées lors des meetings électoraux. Un détail étonnant. Selon le décompte des billets effectué par les guichetiers du Crédit du Nord, la moitié de ces 10 millions a été apportée en coupures de 500 francs. Au total, cette remise d'espèce représente près de 20% des recettes globales mentionnées dans le compte de campagne de Balladur, tel qu'il a été arrêté deux mois plus tard, pour être déposé au Conseil constitutionnel le 5 juillet 1995. Une opération essentielle, la loi interdisant au candidat de présenter un état comptable en déficit".
Lorsque le Conseil constitutionnel présidé par Roland Dumas, a validé les comptes, il n'a nulle part été fait mention de ce versement.
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Libération ajoute que "selon des documents inédits, les commissions promises aux Pakistanais par les Français ont été interrompues un an avant l'attaque terroriste de Karachi".
"Depuis un an, les magistrats s'intéressaient notamment aux allégations concernant le premier flux de corruption, apparemment négocié par des proches de Balladur et interrompu dès 1996. Sans toutefois pouvoir expliquer pourquoi six ans avaient passé avant que l'attentat ne se produise.
Or des éléments ignorés jusqu'à ce jour, et obtenus par Libération au Pakistan, montrent qu'un deuxième flux de corruption promis par l'industrie française de l'armement a été interrompu dans le courant de l'année 2001, soit dans les mois précédant l'attentat. Ces émoluments venaient remercier une grande variété de personnages pakistanais décisifs pour la signature du contrat des sous-marins Agosta de 1994, ainsi que deux autres marchés connexes. L'un, en 1995, avec Thomson CSF pour la fourniture des sonars. L'autre, en 1996, avec Aérospatiale pour des missiles Exocet SM-39".
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BONUS : Tous les partis politiques auraient touché des commissions occultes dans les années 1990
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Archives : L'affaire des associations fantômes financées par le conseil régional socialiste de PACA