Télévision · 29 mar. 2007 à 19:17
La sécurité sera-elle le thème dominant de cette fin de campagne ? 2007 sera-t-il un remake de 2002 ? En quoi ces violences expriment-elles un rejet de l'autorité publique ? Quelle est la situation dans les autres pays européens ? En quoi la personnalité même de Nicolas Sarkozy est-elle la clé du scrutin de 2007 ? Les invités de C dans l'air, mercredi 28 mars 2007, ont répondu à toutes ces questions. Il y avait notamment Christophe Barbier, directeur de la rédaction de l'Express, Alain Bauer, directeur de l'observatoire de la délinquance et Pierre Giacometti de l'institut IPSOS.
Une campagne électorale est toujours dominée par un thème dans les dernières semaines avant l'élection. En 2002, l'insécurité avait dominé la fin de la campagne, notamment en raison de la tuerie au conseil municipal de Nanterre et d'une accumulation d'acte de délinquance.
En 2007, on a cherché ce thème dominant. Aujourd'hui, les tensions sociales, les difficultés de vivre ensemble, avec un arrière fond sur l'identité, la nation, vont dominer les dernières semaines de la campagne. Jusqu'ici, on a zappé les thèmes de campagne, il y a eu beaucoup de débats. Selon Christophe Barbier, la campagne a abordé beaucoup plus de thèmes que lors des campagnes précédentes car en 1988, 1995, 2002, la cohabitation gelait le débat. On ne sait pas si ce thème de l'insécurité va durer dans le temps ou s'effacer comme les autres au bout d'une semaine, mais c'est celui qui a suscité le plus de polémiques en aussi peu de jour.
Selon Alain Bauer, directeur de l'observatoire de la délinquance, les violences de la gare du Nord ne sont pas étonnantes. Il est connu que les lieux à risque sont toutes les grandes gares d'interconnexion : Chatelet-Les halles, Gare du Nord, La défense. Ce sont des lieux stratégiques car ils sont des points de passage des lignes de métro et de RER. La gare du Nord est celle qui cumule le plus grand nombre de faits de délinquance, mais en comparaison aux 800 millions de nombre de voyageurs qui y passent dans l'année, la Gare du Nord est la 100ème gare où il y a le plus de faits de délinquance par voyageur. Mais n'importe quel incident qui a lieu entre 17h-20h, c'est-à-dire aux heures de pointe, crée des complications considérables.
Selon Alain Bauer, ces problèmes de violence dépassent la simple question de la police et de la figure contestée de Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur car les policiers ne sont pas les seules victimes de ces violences. Cela concerne aussi les pompiers, les infirmières, les postiers, c'est-à-dire tous les agents des services publics qui portent un uniforme et qui représentent une institution. Le problème est donc la relation à l'institution, à l'autorité publique.
D'ailleurs, ce problème existe depuis très longtemps. Ainsi, Alain Bauer rappelle qu'il y a 45 ans, on a demandé aux policiers de se dévêtir quand il rentrait chez eux. L'idée qu'il fallait faire disparaître la police, la rendre moins visible pour ne pas attiser les tensions est apparue il y a déjà presque 50 ans.
Depuis ces années, il y a donc deux territoires, celui du centre ville, où l'on peut contrôler, et celui de la banlieue, des espaces périphériques, qui sont dans un processus d'abandon. Or, le retour de la police dans ces territoires est un problème considérable.
Selon Pierre Giacometti, en 2002, dans les 6 mois avant le premier tour, les enquêtes d'opinion montraient que les questions de sécurité dominaient les motivations des électeurs. En mars 2002, 70% des Français mettaient l'insécurité au premier rang de leurs préoccupations.
Aujourd'hui, ce niveau est à 40%. Le contexte a donc changé : ce sont les questions économiques et sociales (retraite, pouvoir d'achat, niveau de vie) qui préoccupent les Français. Les questions de sécurité sont au second plan. Le climat n'est donc pas comparable à celui de 2002 à la même époque.
Par ailleurs, ce thème de l'insécurité est une préoccupation constante dans tous les pays européens. Le directeur d'IPSOS explique ainsi qu'en ce moment, en Grande Bretagne, les deux questions qui préoccupent le plus les anglais, d'après les dernières enquêtes d'opinion, c'est l'insécurité et l'immigration. En Espagne, l'immigration est la deuxième préoccupation après le terrorisme. Il n'y a donc pas d'exception française.
En France, la seule différence notable par rapport à 2002 est l'importance qu'ont eu les émeutes de 2005 dans la mémoire collective. Selon Giacometti, ces émeutes vont peser dans la campagne, ce thème revient dans les enquêtes d'opinion mais il est encore difficile de savoir dans quel sens, cela va jouer. En revanche, il est évident que la personnalité de Nicolas Sarkozy sera un des éléments du choix des électeurs. En Seine-Saint-Denis, il y a une forte augmentation du nombre d'inscrits sur les listes électorales sans savoir vraiment les motivations réelles : de l'anti-Sarkozy ou du pro-Sarkozy. Mais les électeurs, et de surcroit, les candidats, se positionnent en fonction de lui.
Nicolas Sarkozy est le sujet central des questions d'insécurité. Favori de l'élection, ministre de l'Intérieur pendant 4 ans, tous les candidats tirent à boulet rouge sur le candidat de l'UMP et tentent de tirer bénéfice électoralement des incidents. Jean-Marie Le Pen ne dit rien et espère d'engranger des voix silencieusement, Philippe de Villiers a parlé de "groupes ethniques barbares" pour développer son thème de campagne. Les socialistes mettent en avant l'échec du candidat de l'UMP.
On est entré dans un processus de "TSS", "Tous Sauf Sarkozy". En fonction de l'ampleur de ce TSS, il gagne ou il perd l'élection. Son défi sera donc de rassurer, de montrer que sa présence est davantage un élément rassurant qu'un élément d'inquiétude s'il veut l'emporter, souligne Christophe Barbier.
Présidentielle 2007
- Election présidentielle de 2007 : mode d'emploi
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Article de Politique.net
- Quand l'insécurité entre dans la campagne
