Télévision · 19 juin 2007 à 21:25
Les élections législatives ont permis à la droite d'obtenir une majorité absolue à l'Assemblée Nationale. Mais, symbole de la contre-performance de la droite au second tour, Alain Juppé a été battu avec 670 voix d'écart par Michèle Delaunay. Conformément à la règle édictée par le Premier ministre, il a annoncé sa démission du gouvernement. Après un échec en 1997, une condamnation en 2004, Alain Juppé chute à nouveau. Sa carrière politique subit un nouveau coup d'arrêt. Quel est l'avenir d'Alain Juppé ? Est-ce la fin de sa carrière politique ? Les invités d'Yves Calvi de C dans l'air ont tenté de répondre à cette question.
Alain Juppé était considéré par Jacques Chirac comme le "meilleur d'entre nous" pour reprendre son expression. Il a fait toute sa carrière politique dans l'ombre de l'ancien président de la République. En 1995, il est à son apogée avec sa nomination comme Premier ministre. Mais après deux années difficiles où sa côte de popularité s'est rapidement effondrée, Alain Juppé mène la droite à la défaite lors des élections législatives anticipées de 1997. Au lendemain de la dissolution ratée de Jacques Chirac, il apparaît comme le principal responsable : « droit dans ses bottes », il s'est montré rigide et peu ouvert au dialogue. La gauche remporte les élections et ouvre la plus longue période de cohabitation.
Alain Juppé entame une longue traversée du désert après l'échec aux législatives de 1997. Il a néanmoins conservé son poste de maire de Bordeaux et de député de Gironde. En 2002, il n'entre pas dans le gouvernement de Raffarin, bien que Jacques Chirac ait conservé des liens étroits avec son ancien Premier ministre. Il prend en revanche la tête de l'Union pour un Mouvement Populaire, grand parti de la droite et du centre qui a été créé au lendemain de la victoire de Jacques Chirac. Pendant un an et demi (de mai 2002 à janvier 2004), il va diriger l'UMP, pesé sur les décisions mais ne participera pas aux gouvernements successifs en raison de son impopularité et surtout d'une mise en examen dans l'affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris.
En janvier 2004, Alain Juppé est condamné à 10 ans d'inéligibilité. En tant que responsable du RPR et bras droit de Jacques Chirac à la mairie de Paris, il est condamné pour ne pas avoir mis un terme au financement de personnels du RPR par la mairie de Paris. Pendant 48h, Alain Juppé a la "tentation de Venise", expression reprise d'un ouvrage qu'il a rédigé dans lequel il expliquait qu'il pourrait quitter la vie politique. Pressé par ses amis de ne pas abandonner, il décida de ne pas annoncer de retrait de la vie politique et de faire appel du jugement car une condamnation à 10 ans signifiait la fin de sa carrière politique. Au cours de l'année, il a démissionné de tous ses mandats, de député, de maire de Bordeaux, de président de l'UMP, pour préparer son procès en appel au mois de décembre. La peine est réduite à 1 an d'inéligibilité. Alain Juppé décide alors de s'exiler au Canada pendant plus d'un an avant de revenir en 2006. Il récupère son poste de maire de Bordeaux et affiche son soutien à Nicolas Sarkozy pour l'élection présidentielle de 2007
Après la victoire de Nicolas Sarkozy, Alain Juppé est nommé ministre d'Etat chargé du développement durable. Numéro 2 du gouvernement, il fait un retour remarqué dans la vie politique nationale. Mais dimanche 17 juin, il subit un nouveau revers. Avec seulement 670 voix d'écart, il est battu par la candidate socialiste aux élections législatives. Il est contraint à la démission du gouvernement. Dépité, déprimé selon certains, Alain Juppé est atteint par ce nouvel échec. Le lendemain de sa défaite, alors que les journalistes se pressaient autour de lui lors d'une inauguration, il laissa exprimer sa rancœur :
Alain Juppé, tenté de quitter la vie politique, a finalement décidé de rester maire de Bordeaux jusqu'aux prochaines municipales en 2008. Reste à savoir ce qu'il fera. Selon le politologue Dominique Reynié, les élections municipales s'annoncent difficiles pour la droite dans les grandes villes, notamment à Bordeaux. A la présidentielle, Ségolène Royal est arrivée largement en tête à Bordeaux, et aux législatives, Alain Juppé a été battu. Par conséquent, il n'est pas sur qu'il se représente à la mairie en risquant une nouvelle défaite qui signifierait la fin définitive de sa carrière politique. Selon Pascal Périnneau, au contraire, il n'est pas certain qu'il perde la mairie en 2008 car la gauche est minoritaire à Bordeaux. Sa défaite est d'abord liée au MoDem de Bayrou. La première étape du retour d'Alain Juppé se fera donc à Bordeaux.
Agé de 62 ans, il en aura donc 67 en 2012, c'est-à-dire l'âge de Bernard Kouchner aujourd'hui. Il peut donc très bien revenir sur la scène nationale, même avant, puisqu'il y a des élections intermédiaires en 2009 (européennes) et 2010 (régionales) qui donneront lieu peut être à des remaniements.
La carrière politique d'Alain Juppé n'est donc pas complètement terminée. Il entame une troisième traversée du désert et il espère pouvoir revenir. Mais il porte une grande responsabilité dans ses échecs et il reste mal aimé dans l'opinion. En tout état de cause, le "meilleur d'entre nous" comme disait Jacques Chirac connaît une fin de carrière politique difficile.
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