Zapping radio · 2 nov. 2007 à 21:05
En 2005, les Français ont dit Non à la ratification de la Constitution européenne. Pendant la campagne présidentielle de 2007, Nicolas Sarkozy s'était engagé à relancer la construction européenne en proposant un "traité simplifié", c'est-à-dire les principales réformes institutionnelles qui étaient incluses dans la constitution et qui faisaient consensus. Il avait par ailleurs affirmé que le nouveau traité serait ratifié par le parlement et non par référendum.
Adopté lors d'un sommet européen en octobre, le traité de Lisbonne doit être ratifié par la France. Nicolas Sarkozy refuse d'organiser un référendum au grand dam des opposants à la Constitution de 2005 qui dénoncent un coup de force. Dans sa chronique sur France Culture du mercredi 31 octobre, Olivier Duhamel s'interroge sur l'opportunité d'un nouveau référendum.
De multiples raisons peuvent expliquer le Non au référendum sur la constitution européenne. On peut tout de même en retenir trois : il s'agissait d'un vote de protestation contre le gouvernement Raffarin de plus en plus impopulaire, les Français profitaient également de ce vote pour exprimer leur mécontentement à l'égard d'une Europe qui s'est construite trop longtemps sans qu'on ne leur demande leur avis, notamment au sujet des élargissements successifs. Enfin, le texte de la Constitution européenne était indigeste et incluait une partie "économie" qui n'avait pas sa place dans un texte de loi censé définir uniquement les différents pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire).
Le nouveau traité européen reprend une partie du texte de la constitution européenne de 2005. Mais s'agit-il exactement du même texte ? Sur de nombreux points, les deux textes sont différents. Tout d'abord, il n'y a plus de partie économique, celle qui faisait l'objet des plus virulentes critiques des opposants à la constitution. D'autres reculs permettent d'affirmer que ce texte tient compte du refus de 2007 : la libre concurrence ne figure plus parmi les valeurs de l'Europe, les symboles de l'Union sont absents du texte afin de ne pas froisser les souverainistes qui défendent les nations. Dans ce texte, l'affirmation que le droit européen est supérieur au droit national a été retirée pour les mêmes raisons. Enfin, il ne s'agit plus d'une constitution mais d'un simple traité qui modifie les institutions européennes pour le rendre plus efficaces.
Du point de vue juridique, rien n'oblige à adopter un traité européen par référendum. C'est au président de la République que revient le choix du mode de ratification : référendum ou vote du parlement. Historiquement, les chefs d'Etat ont pratiqué les deux modes de ratification. En 1972, Georges Pompidou a choisi d'organiser un référendum pour approuver l'entrée du Royaume Uni dans la CEE. En 1992, Mitterrand a choisi la voie référendaire pour adopter le traité de Maastricht. Enfin, en 2005, Jacques Chirac s'est résolu à organiser un référendum pour adopter la constitution européenne. En revanche, tous les élargissements successifs de l'Union Européenne ont été acceptés par le parlement (à l'exception de 1972). De même, le traité de 1986 instaurant un marché unique en Europe a également été ratifié par les députés et les sénateurs.
Les partisans du Non au référendum de 2005 considèrent que le nouveau traité de 2007, qui s'inspire du texte de la constitution européenne, doit être ratifié par référendum. Selon eux, c'est une question de démocratie : c'est au peuple de choisir et non aux députés dont on sait qu'ils vont forcément voter en faveur de ce traité.
Sur la nécessite ou non d'un référendum, on retrouve le même clivage qu'en 2005. Le PS est divisé, les partisans du Non souhaitent un référendum, ceux du Oui se contenteront d'une ratification par le parlement. Les partis d'extrême gauche rejettent en bloc la construction de l'Europe actuelle et réclament un référendum pour défendre le Non. Enfin, les souverainistes de droite dénoncent le contenu d'un texte qui ferait perdre à la France un peu plus de son pouvoir de décision sur son territoire.
En résumé, ceux qui sont hostiles au traité espèrent un référendum et un vote négatif, ceux qui sont favorables au traité préfèrent jouer la prudence en passant par le parlement.
Les deux textes de 2005 et de 2007 sont donc différents. C'est ce qui explique que le président de la République ne se sente pas obligé d'organiser un nouveau référendum. En passant par la voie parlementaire pour la ratification, Nicolas Sarkozy évite le risque d'un nouveau refus qui marquerait assurément un coup d'arrêt définitif à la construction européenne.
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