Revue de presse · 10 déc. 2007 à 20:10
Le dirigeant libyen, le colonel Kadhafi entame aujourd'hui une visite de 5 jours en France. Il doit notamment rencontrer le président de la République et le président de l'Assemblée nationale. Sa dernière visite officielle remonte à 1973. Depuis, la Libye était au ban de la communauté internationale en raison notamment de sa légitimation du terrorisme.
Cette visite est donc vivement critiquée par les défenseurs des droits de l'homme. Tout le monde sait que la Libye est une dictature qui pratique la torture contre les opposants au régime. Malgré cela, Nicolas Sarkozy est le premier dirigeant occidental à accueillir Kadhafi. Et, ironie du sort, cette visite officielle débute ce lundi 10 décembre, date de la journée internationale des droits de l'homme. Pour tenter de limiter la polémique, le pouvoir a prévu une répartition des tâches bien définie : à Kouchner et Rama Yade la critique, à Sarkozy la signature des contrats économiques.
- Le Monde : Et Kadhafi devint respectable
- Libération : Rama Yade convoquée à l'Elysée après ses critiques contre Kadhafi
- NouvelObs : Sarkozy a parlé droits de l'Homme (un peu) et contrats (10 milliards) avec Kadhafi
Le colonel Kadhafi est en visite officielle en France pendant 5 jours. C'est Michèle Alliot-Marie, la ministre de l'intérieur, qui a accueilli Mouammar Kadhafi au pavillon d'honneur de l'aéroport d'Orly. Le dirigeant libyen doit séjourner à Marigny, la résidence des hôtes étrangers du président de la République. Mais rien ne se refuse au dirigeant libyen puisqu'une tente bédouine chauffée a été installée dans le parc de cet hôtel particulier jouxtant l'Élysée. Au programme de ces cinq jours : deux rencontres avec Nicolas Sarkozy, un entretien avec le président de l'Assemblée nationale, plusieurs réunions de travail pour la signature de contrats économiques, et une visite du château de Versailles avec l'organisation d'une chasse présidentielle, du jamais vu depuis Mitterrand.
En cette journée internationale des droits de l'homme, cette visite apparaît comme une provocation. La Libye est une dictature qui pratique la torture, et le week-end dernier, le dirigeant libyen a de nouveau légitimé le terrorisme en déclarant en marge du sommet Europe-Afrique de Lisbonne : "Il est normal que les faibles aient recours au terrorisme".
Cette visite est vivement critiquée par les défenseurs des droits de l'homme. Le président du groupe socialiste à l'Assemblée Nationale, Jean-Marc Ayrault, a demandé l'annulation de la rencontre entre le dirigeant libyen et le président de l'Assemblée Nationale. Ségolène Royal s'est déclarée choquée par un accueil "tout simplement odieux".
Nicolas Sarkozy présente cette visite comme la suite de la libération des infirmières bulgares. Selon lui, le régime libyen est en train de se réformer et la France doit accompagner ce changement. En outre, l'accueil de Kadhafi par la France est intéressé puisque sa venue coïncide avec la signature de contrats de commande évalués à plusieurs milliards d'euros.
Dans le même temps, la secrétaire d'Etat aux droits de l'homme, Rama Yade, a eu des mots très durs à l'encontre de Kadhafi. Dans une interview accordée au Parisien, elle a notamment déclaré : "Le colonel Kadhafi doit comprendre que notre pays n'est pas un paillasson, sur lequel un dirigeant, terroriste ou non, peut venir s'essuyer les pieds du sang de ses forfaits. La France ne doit pas recevoir ce baiser de la mort. (...) Ce qui me dérange, c'est qu'il arrive un jour de célébration des droits de l'homme. Il serait indécent en tout cas que cette visite se résume à la signature de contrats ou d'un chèque en blanc (...) Il ne faut pas que Nicolas Sarkozy tourne le dos à la diplomatie des valeurs. Si on y met le couvercle, je risque le chômage technique !".
De son côté, Bernard Kouchner se montre plus prudent. Dans une tribune au quotidien La croix, le ministre des Affaires étrangères affirme qu'il n'est pas question d'oublier au nom de la realpolitik les victimes du régime libyen. La France doit rester vigilante mais elle ne doit pas, pour autant, fermer la porte à la Libye.
Ces différentes déclarations reflètent bien le jeu de rôle du président de la République et de ses ministres. C'est la stratégie du double discours : on condamne, mais on accueille. Il n'est pas certain que le peuple ne perçoive pas ce jeu de dupe. La diplomatie de Nicolas Sarkozy va à l'encontre de ses engagements de campagne. Le candidat Sarkozy voulait "moraliser" les relations internationales. Mais une fois au pouvoir, le président de la République semble préférer les contrats aux droits de l'homme, quitte à ne pas respecter ses promesses.
- Libye : les coulisses de la libération des infirmières bulgares
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