Zapping radio · 17 déc. 2007 à 23:42
Lorsque Nicolas Sarkozy est arrivé au ministère de l'Intérieur, il a voulu imposer la "culture du résultat". Expérimenter des solutions pour diminuer la délinquance, évaluer les dispositifs et les réajuster si ceux-ci ne sont pas suffisamment efficaces. Au ministère de l'économie, il a appliqué les mêmes principes, avec une règle de base : communiquer, convaincre l'opinion pour créer les conditions d'un contexte favorable à l'application de ses mesures. "Culture du résultat", "expérimentation", "évaluation", "efficacité", "communication". Tous ces termes renvoient au milieu de l'entreprise, du management. Avec l'arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, on assiste à l'avènement du management en politique. Un Etat se doit d'être géré comme une entreprise. Devant cette révolution des moeurs politiques, des formations de 8 jours un peu particulières ont été créées par un institut. C'est ce que révèle France Info dans un reportage du 14 décembre 2007.
On connaissait l'Ecole Nationale d'Administration (ENA), les Instituts d'Etudes Politiques (IEP, Sciences Po) mais désormais, les hommes politiques en activités peuvent compléter leur cursus en formation continue grâce à la création d'un séminaire sur les techniques de management en politique. C'est l'institut Aspen France, dirigé par le président de BNP Paribas, Michel Pébereau, qui est à l'origine de cette formation.
Aspen, est le nom de la chic station de ski du Colorado. C'est là-bas qu'a été créé cet institut en 1949, qui est une sorte de club de réflexion. L'ancien directeur de CNN est l'actuel président de l'institut et Madeleine Albright, ancienne secrétaire d'Etat de Bill Clinton, fait partie du conseil d'administration. Aspen France, né en 1983, est donc issu de cet institut américain. En 1994, Aspen France s'est installé à Lyon sous la présidence de Raymond Barre. En 2006, l'institut a ouvert une formation de management pour les hommes politiques.
Dans les entreprises, les futurs dirigeants sont préparés à leur métier par des formations alors qu'il n'y en a pas dans la vie politique. Aspen propose donc une formation, un accompagnement pour de jeunes élus qui viennent suivre en quelque sorte des cours du soir.
Au départ, un jury propose une soixantaine de candidats à la formation, puis en sélectionne une vingtaine parmi les plus prometteurs. Il faut remplir deux conditions pour être retenu : avoir entre 30 et 45 ans et être déjà élu. Cécile Duflot, la secrétaire générale des Verts, a participé à cette formation de quatre fois deux jours, au côté d'hommes politiques étrangers venus du Liban, de Roumanie, de Belgique, du Maroc. La députée verte avait été proposée par Dominique Voynet. Après avoir envoyé un dossier d'inscription, elle a été reçue par un membre du jury, un chasseur de tête, pour un entretien de présélection avant de pouvoir participer à la formation.
Un jury composé de politologues, directeurs de ressources humaines, sélectionne les 20 lauréats qui pourront suivre cette formation. En 2006, Simone Veil était la présidente de jury. Cette année, il s'agit de Michel Rocard.
Lors des huit jours de formation, les intervenants viennent d'horizon divers. L'année dernière, Jean-Marie Messier, ancien patron de Vivendi Universal, est venu partager l'expérience qu'il a eue à la tête d'une grande multinationale. Nicole Notat, Christian Blanc, ancien patron d'Air France devenu député, sont également venus dispenser quelques cours.
L'objectif du séminaire est d'apprendre aux élus à faire passer leurs idées et à développer leur leadership. Ainsi, la politique devient un métier comme un autre alors qu'auparavant, elle était d'abord idéologique et technocratique. Désormais, les élus doivent prendre en compte les impératifs de l'exercice du pouvoir tout en étant à l'écoute du peuple.
Les intervenants sont bénévoles mais la location de locaux, la rémunération des membres du jury coûtent 80 000 euros par participants à la formation. Le financement de cette formation est assuré pour moitié par l'institut Aspen, et pour moitié par de grandes entreprises (Accor, BNP Paribas, Veolia) et des fondations très proches des partis politiques, toutes tendances confondues comme la Fondation Gabriel Péri (PCF), la Fondation Jean Jaurès (PS), la Fondation pour l'innovation politique (proche de Jean-Pierre Raffarin). Cette formation des élites de demain n'est donc pas complètement désintéressée et permet à ces jeunes leaders politiques de développer leur réseau. Parmi les 22 lauréats de la session 2006 figure Laurent Wauquiez, porte-parole du gouvernement Fillon.
*** Source
- Yannick Falt, "A l'école des jeunes loups de la politique", France Info, 14 décembre 2007
- Sarkozy et les médias : l'information neutralisée par la communication politique
- Faillite, rigueur, guerre : les mots tabous en politique
- Présidentielle 2007 : le rôle central de l'opinion
- Le rôle des instituts de sondage dans la campagne électorale
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