Municipales 2008 · 17 jan. 2008 à 21:24
Lors du dernier conseil des ministres, François Fillon a du faire un rappel à l'ordre. Le Premier ministre s'agace des nombreux couacs de communication de ses ministres. Dernier en date : la querelle qui oppose par médias interposés Christine Boutin et Fadela Amara à propos du plan banlieue que la secrétaire d'Etat à la ville doit présenter la semaine prochaine. Dans une déclaration à la presse, Christine Boutin s'est interrogée sur la pertinence d'un plan strictement réservé à la banlieue, manière de désavouer le travail de sa secrétaire d'Etat. Fadela Amara a aussitôt répondu en défendant son projet. En réalité, derrière cette petite polémique se cache un enjeu stratégique majeur : les centres-villes.
- Le Figaro : Municipales, es Français privilégient les enjeux locaux
- Libération : Un milliard d'euros pour 50 quartiers en difficulté
- Le Monde : Les centres-villes, enjeu stratégique des municipales
Au premier abord, la polémique entre Christine Boutin et Fadela Amara peut surprendre. La ministre du logement a tout simplement désavoué tout le travail de sa secrétaire d'Etat au cours d'une interview au quotidien "La Croix" en déclarant qu'elle ne croyait pas "en un plan banlieue mais en une réponse beaucoup plus globale d'une nouvelle politique de la ville". En clair, elle ne veut pas que la droite oublie les vieux centres des villes où, dit-elle, des bâtiments mériteraient aussi à être rénovés. En réalité, l'intervention de Christine Boutin est moins une critique du plan banlieue que prépare Fadela Amara qu'un coup de pouce réclamé par les élus UMP. En effet, les dernières élections ont montré une évolution de la géographie électorale.
Peu importe les résultats globaux des municipales. PS et UMP savent que la réussite ou non des municipales dépend des résultats dans les grandes villes. En 2001, la gauche avait connu un certain reflux électoral mais les victoires symboliques à Paris et Lyon avaient permis à la gauche d'apparaître comme le véritable vainqueur des municipales. Or, en 2008, la situation de la droite dans les grandes villes ne s'est pas arrangée. A Paris, Françoise de Panafieu n'apparaît pas en mesure de pouvoir battre Bertrand Delanoë. A Lyon, les premiers sondages indiquent que Dominique Perben est très loin derrière le maire PS sortant, Gérard Collomb. A Lille, la réélection de Martine Aubry paraît acquise. A Bordeaux, la défaite d'Alain Juppé aux élections législatives a montré la percée de la gauche dans la ville. Le PS rêve d'infliger une nouvelle défaite à Alain Juppé, synonyme de fin de carrière.
Aux dernières élections, les résultats ont surpris les spécialistes de la géographie électorale. Si Ségolène Royal a largement perdu au second tour face à Nicolas Sarkozy, elle a réalisé de très bons scores dans certaines parties du territoire, notamment dans les centres-villes comme à Paris.
Trois explications peuvent être apportées à ce basculement :
1. Depuis des années, Nicolas Sarkozy a axé son discours sur la politique de la ville en évoquant exclusivement le problème des banlieues. Immigration, intégration, identité nationale, sécurité sont autant de sujets qui touchent essentiellement les banlieues. De fait, les populations des centres-villes ont été délaissées par la droite et récupérées par la gauche bo-bo.
2. Les centres-villes sont occupés par deux catégories de population : une classe bourgeoise qui vote plutôt à droite, et une catégorie plus jeune composée essentiellement d'étudiants. Or, précisément, les étudiants ont pris l'habitude de voter sur leur lieu de vie d'études (chambres d'étudiants) plutôt que chez leurs parents. Et traditionnellement, les étudiants votent plutôt à gauche.
3. Une part importante de l'électorat de droite est composée de dirigeants de PME et de non-actifs (retraités et femmes au foyer). Or, ces catégories de la population ont tendance à quitter les centres-villes pour des quartiers résidentiels situés dans des villes périphériques.
Par conséquent, entre les bobos et les étudiants situés en centre-ville, et la classe moyenne et les dirigeants de PME situés dans des villes de banlieue chic, la droite se retrouve en difficulté dans les grandes villes. Les centres-villes sont donc devenus des enjeux stratégiques pour tenter de faire basculer les municipales. C'est en ayant cette géographie électorale en tête que Christine Boutin a souhaité rappeler que le gouvernement n'entendait pas délaisser ces centres-villes au profit des quartiers défavorisés, dont on sait que de toute façon, ils sont acquis à la gauche.
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