Questions d'actualité · 15 fév. 2008 à 23:32
Les médias sont focalisés sur les élections municipales. Mais le même jour se déroulent d'autres élections : les élections cantonales. Celles-ci intéressent peu les électeurs car elles ont pour but d'élire des conseillers généraux dont le travail est souvent ignoré par la population. Pourquoi ces élections cantonales n'intéressent-elles personne ? Tout simplement parce que chaque élection se déroule sur une circonscription aux contours inconnus, qui ne recouvre aucune réalité territoriale tangible. Un canton est un regroupement de villes, la plupart du temps ignoré par les électeurs. A chaque changement de carte électorale, le canton n'inclut pas les mêmes villes. Dès lors, ces élections sont considérées comme subalternes alors que le conseil général gère des secteurs essentiels de la vie quotidienne des citoyens. Quels sont les enjeux de ces élections cantonales ? A quoi servent-elles ?
Les élections cantonales permettent aux électeurs d'élire, par la voie des urnes, les conseillers généraux. Contrairement aux maires, les conseillers généraux agissent au niveau départemental. Un maire peut siéger au Conseil général et cumuler les deux fonctions. Les élections cantonales ont donc pour but de faire élire des conseillers généraux qui devront gérer la politique du département.
Un conseiller général est élu pour 6 ans, mais le conseil général est renouvelé par moitié tous les 3 ans. Comme les élections cantonales sont peu plébiscitées par l'opinion, elles se déroulent systématiquement en même temps que des élections municipales ou des élections régionales.
Depuis 1789, le Conseil général est composé de plusieurs cantons dont le nombre varie d'une région à l'autre. Comme pour les élections législatives ou l'élection présidentielle, les élections se font en deux tours. Deux candidats seulement participent au second tour. Le candidat qui a obtenu la majorité des suffrages remporte les élections et peut siéger au Conseil général. Les différents cantons d'un département sont représentés chacun par un conseiller général.
Le conseil général se réunit au moins une fois par trimestre. Lors de ces séances publiques, les différents membres sont appelés à voter les délibérations, sous la présidence du Président du conseil général. Celles-ci concernent avant tout la création des services publics départementaux, la gestion des biens des départements et son budget.
Lors de la première séance à chaque renouvellement triennal du Conseil, les membres votent pour le président. C'est à lui que revient la tâche de préparer puis de faire exécuter les délibérations et les décisions votées lors des séances. Il doit non seulement veiller au bon fonctionnement de la gestion du budget mais en plus rendre compte de la situation du département aux conseillers une fois par an. Il est enfin l'unique responsable de l'administration départementale.
Le conseil général doit veiller à la bonne gestion de son département. Il mène donc différents chantiers pour mener à bien son projet. C'est à lui de décider, lors des séances trimestrielles, du budget à leur consacrer. Chaque département décide de ses propres orientations concernant l'environnement, l'éducation, les collèges, les transports régionaux, les aides sociales...
Puisque le conseil général ne se réunit qu'une fois par trimestre en moyenne, l'essentiel du travail s'effectue dans une commission permanente qui gère les affaires courantes. La commission permanente est composée du président et de neuf conseillers. Elle se réunit une fois par mois pour s'occuper des affaires courantes. Elle organise et s'occupe du suivi des projets du Conseil général. aux différents services administratifs et techniques, assumés par les fonctionnaires territoriaux, le Conseil général peut mettre en place ses projets.
L'élection présidentielle est l'élection qui intéresse le plus les Français, suivi par l'élection du maire. Dans les deux cas, d'un bout à l'autre de l'appareil administratif français, les citoyens ont le sentiment que leur vote influe sur le destin national et sur la conduite de la ville. La région est déjà une circonscription administrative plus lointaine, même si elle est devenue la norme dans la plupart des pays d'Europe.
Reste donc les départements, gérés par des conseils généraux, dont les membres sont élus lors d'élections cantonales qui battent à chaque fois des records d'abstention au point d'être organisées le même jour que les élections municipales ou régionales. Pour simplifier le découpage administratif du territoire et faire des économies de gestion, le rapport Attali a d'ailleurs proposé de supprimer les départements et de transférer leurs compétences aux régions. Les citoyens ignorent tout du rôle du conseil général et la notion de canton échappe à la très grande majorité des habitants. Finalement, seuls les responsables politiques refusent la suppression des départements car cela supprimerait d'autant le nombre de fonctions électives. Or, le poste de « conseiller général » est souvent très prisé par les responsables politiques qui pratiquent le cumul des mandats.
Les régions sont plus connues que les conseils généraux. Pourtant, ceux-ci disposent d'un budget beaucoup plus élevé que celui des régions. Ainsi, en 2007, le budget des départements, donc des conseils généraux, s'élevait à 63 milliards d'euros alors que les régions ne pèsent que 25 milliards d'euros. Cet écart s'explique par le rôle déterminant des conseils généraux sur toutes les questions sociales. Ce sont les conseils généraux qui s'occupent du paiement du RMI, des aides aux handicapés et aux personnes âgées. Et ces dépenses seront amenées à croître régulièrement. Voilà pourquoi les départements ont un poids financier beaucoup plus important que celui des régions.
En outre, les conseils généraux assoient leur légitimité en étant le principal distributeur des subventions aux communes. L'aide financière apportée à un maire est souvent capitale, pour restaurer un bâtiment, financer des travaux de voirie ou aménager un rond-point. En guise de remerciements, le maire peut alors favoriser tel ou tel candidat lors des élections sénatoriales auxquelles seuls les élus ont le droit de voter. De fait, le parcours politique des conseillers généraux s'achève souvent par un mandat de sénateur.
La légitimité d'une institution très méconnue du grand public est donc posée à partir du moment où les électeurs ignorent jusqu'à l'existence même des cantons et le rôle de leur conseiller général. Une gestion rationnelle du territoire devrait entraîner la suppression des conseillers généraux et des élections cantonales. Mais comme les élus évitent toujours de scier la branche sur laquelle ils sont assis, une telle réforme risque de ne jamais voir le jour. A défaut d'une réforme en profondeur, les élections cantonales continuent à être une anomalie du système français, en étant la seule élection qui se déroule presque sans électeur.
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