Clic droit, clic gauche · 17 mai 2008 à 22:01
Alors qu'Internet est devenu un outil essentiel au service de la liberté d'expression et de la démocratie, les entreprises occidentales se rendent complices de la censure dans les dictatures du monde entier. Les logiciels de filtrage proviennent majoritairement de sociétés américaines. Les géants d'Internet comme Yahoo et Microsoft ont signé un "pacte d'autodiscipline" avec la Chine. En clair, ces sociétés acceptent de se soumettre au gouvernement chinois et de collaborer pour censurer la toile et poursuivre les cyberdissidents.
Dossier sur la censure politique sur Internet :
3ème partie : Les sociétés occidentales au service de la censure
Tous les pays qui cherchent à contrôler les publications en ligne doivent utiliser des systèmes de filtrage, tous élaborés aux Etats-Unis. C'est le cas par exemple de la Tunisie, l'Arabie Saoudite, du Soudan qui utilisent tous un logiciel du nom de "SmartFilter", fabriqué par une société américaine de la Silicon Valley.
L'infrastructure numérique de la Chine est entièrement américaine. Et les entreprises, notamment les producteurs de routeurs qui permettent d'acheminer les données, n'hésitent pas à satisfaire toutes les demandes des autorités chinoises, notamment en paramétrant les routeurs afin de bloquer certaines données jugées "subversives".
En août 2007, dans le plus grand secret, Yahoo et Google ont signé un "pacte d'autodiscipline" qui les engagent à collaborer avec les autorités chinoises afin de "protéger les intérêts de l'Etat". En clair, Yahoo efface de ces résultats de recherche tous les blogs d'opposants au régime et l'entreprise a déjà fournit les coordonnées de cyberdissidents utilisant des boites mails de la marque américaine. Ainsi, il est désormais avéré que Yahoo a transmis aux autorités chinoises les informations personnelles d'un dissident qui avait publié de façon anonyme des textes critiques à l'égard du pouvoir sur des forums de discussion. Cet opposant a été arrêté grâce à la coopération de Yahoo et purge actuellement une peine de prison de 10 ans.
Les associations de défense des droits de l'homme dénoncent depuis des années l'attitude ambiguë de plusieurs sociétés Internet. En février 2006, le gouvernement américain s'est emparé du dossier en créant une commission à la chambre des représentants chargée d'évaluer la nature des relations entre certaines entreprises américaines et les autorités chinoises. Yahoo s'est retranchée derrière les règles commerciales et juridiques en vigueur : une filiale étrangère doit respecter les lois du pays d'accueil.
Les activités de ces sociétés sont liées à un vide juridique : aux Etats-Unis, une loi datant de 1989 interdit aux entreprises américaines de vendre à la police chinoise des équipements utilisés à des fins répressives. Mais cette loi ne s'applique pas à Internet. Une entreprise américaine ne peut pas exporter des menottes en Chine, mais peut très bien fournir du matériel informatique au service de la censure. La loi devrait changer prochainement, suite aux multiples pressions des associations des droits de l'homme qui dénoncent le comportement.
*** Sources
- Sylvie Kauffmann, "La censure sur Internet : Etats contre cyberdissidents", Le Monde, 29 Août 2007
- "Yahoo et MSN signent un pacte d'autodiscipline pour les blogs", La Tribune, 24 août 2007
La censure politique sur Internet
- La technique au service de la censure politique sur Internet
- Une dizaine de pays traque les cyberdissidents
- Quand les géants d'Internet négocient avec les dictatures
- 40 000 policiers du net surveillent 220 millions d'internautes en Chine
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