Revue de presse · 23 mai 2008 à 18:58
Premier secrétaire du Parti Socialiste depuis 11 ans, François Hollande n'est pas candidat à sa succession en novembre prochain. Pour autant, il compte bien jouer un rôle d'arbitre dans la désignation de son successeur. Mais comment ? Chaque leader qui souhaite se porter candidat doit déposer une motion, c'est-à-dire un texte de référence sur lequel les militants devront se prononcer. Des alliances et des synthèses sont alors possibles et permettent de dégager une majorité. Comment François Hollande peut-il influencer le congrès ? Tout simplement en proposant sa propre motion. Spécialiste des "synthèses molles", il pourrait alors écarter Royal et Delanoë et promouvoir un Premier secrétaire plus neutre, lui permettant de conserver ses chances pour 2012. Décryptage.
- Libération : Hollande pourrait présenter une contribution pour le congrès PS
- Le Figaro : Le profil impossible du futur numéro un du PS
- Le Monde : Un congrès du PS ne se gagne plus forcément à gauche
François Hollande détient le record de longévité à la tête du PS, dépassant d'une année François Mitterrand qui avait été Premier secrétaire de 1971 à 1981. Mais que reste-il de ces 11 années de mandat ? Contrairement à l'ancien président de la République, François Hollande n'a jamais réussi à imposer son leadership à gauche.
Son bilan à la tête du PS est relativement faible. De 1997 à 2002, François Hollande n'est pas rentré dans le gouvernement à la demande de Lionel Jospin afin qu'il garde les clés du parti. Pendant toute la cohabitation Jospin/Chirac, François Hollande va donc s'attacher à ce que le PS apporte un soutien sans faille au gouvernement. En 2002, lorsque Lionel Jospin perd l'élection présidentielle, le Premier secrétaire du PS a le souci de préserver l'unité du parti après le choc de 21 avril. C'est cet objectif qui a guidé son action entre 2002 et 2007. Mais la recherche systématique de "synthèses molles" pour ne fâcher personne a asséché le corpus idéologique d'un parti qui n'a pas su se renouveler. François Hollande est considéré comme le principal responsable de cet immobilisme. La rénovation post-présidentielle 2007 devait donc se faire sans lui.
Fidèle à sa stratégie de synthèse, François Hollande, qui déteste les ruptures, a refusé de convoquer un congrès extraordinaire du Parti Socialiste au lendemain de la présidentielle. Alors que Ségolène Royal voulait accélérer le calendrier afin de prendre dans la foulée de la présidentielle la tête du PS, le Premier secrétaire a préféré temporiser et organiser lui-même le début de la rénovation du parti. Des forums de la rénovation se sont donc tenus pendant plusieurs mois, la déclaration de principe du PS qui fixe la ligne politique du parti a été modifiée, et le congrès du PS se tiendra en novembre prochain, comme prévu.
Avec cette stratégie de la tortue, François Hollande a non seulement réussi à rester l'acteur principal de la première étape de la rénovation du parti, mais il a affaibli celle qui voulait s'emparer du PS et le pousser vers la sortie. En effet, si Ségolène Royal pouvait logiquement prétendre à prendre la tête du PS après l'élection présidentielle, sa candidature est moins évidente un an après. Bertrand Delanoë, réélu maire de Paris, s'est placé en rival sérieux de l'ex-candidate socialiste. Quant aux autres opposants de la présidente de la région Poitou-Charentes, ils ont pu utiliser cette année pour s'organiser. François Hollande a donc réussi à éviter sa marginalisation en restant à la tête du PS une année de plus.
Même si l'actuel Premier secrétaire a annoncé qu'il ne se représenterait pas, plusieurs sources indiquent qu'il s'apprête à déposer une motion en vue du congrès de novembre prochain. C'est la déposition d'une contribution qui lui permettrait de peser dans le choix de son successeur. En tant que Premier secrétaire, François Hollande n'a jamais bâti son propre courant au sein du PS, même s'il bénéficie d'une bonne côte de popularité auprès des militants et des cadres du parti. Il pourrait alors se servir du congrès pour compter ses soutiens, connaître son poids réel dans le parti. Il se murmure déjà que le texte de François Hollande obtiendrait l'approbation d'une majorité de secrétaires fédéraux. Spécialiste des synthèses qui contentent tout le monde, François Hollande pourrait alors s'installer en arbitre de la bataille Royal/Delanoë.
Le dépôt d'une motion "Hollande" pourrait écarter les deux favoris pour le poste de Premier secrétaire. De nombreux socialistes redoutent l'affrontement entre le maire de Paris et la présidente de la région Poitou-Charentes. L'arrivée d'un présidentiable à la tête du PS aggraverait certainement les divisions au sein du PS. Or, certains veulent déconnecter ce congrès de la désignation du candidat à la prochaine présidentielle qui doit intervenir en 2010.
François Hollande pourrait alors jouer ce rôle de rassembleur, non pas sur son nom, mais à partir de sa motion de synthèse. Dès lors, l'unité du parti passerait par la désignation d'un Premier secrétaire de transition qui rénoverait le parti, en dehors de toutes considérations de personne. Les présidentiables s'affronteraient alors en 2010 lors de nouvelles primaires.
A de multiples reprises, François Hollande a fait le portrait du candidat idéal au poste de Premier secrétaire : "Une personne pas forcément médiatique, prêt à s'investir à 100% au parti". Exit donc Royal et Delanoë. En les écartant, François Hollande conserverait alors ses chances pour participer aux primaires pour la désignation du candidat en 2012.
Reste à savoir qui pourrait jouer ce rôle de Premier secrétaire de transition. Plusieurs proches de François Hollande sont sur les rangs : Stéphane le Foll, son directeur de cabinet, Bruno le Roux ou encore Michel Sapin, qui vient de prendre ses distances avec Ségolène Royal.