Livres politiques · 9 juin 2008 à 21:39
Lorsque la gauche dénonce les « cadeaux fiscaux » faits aux plus riches par Nicolas Sarkozy, la droite s'insurge et s'en prend à la démagogie des socialistes. Quand la presse publie des dossiers sur les relations qu'entretient Nicolas Sarkozy avec les puissants, le lecteur prédit un dossier à charge. Dans le livre de Renaud Dély et Didier Hassoux, Sarkozy et l'argent roi, un chapitre entier est consacré aux « riches » amis du président. La plupart des informations sont déjà connues du grand public mais la synthèse qui en est faite est édifiante. Nicolas Sarkozy, qui aime à répéter qu'il ne doit son ascension à personne et qu'il n'est en aucun cas un héritier, oublie de préciser qu'il s'est attaché avec constance à obtenir les soutiens de l'élite financière.
Deux journalistes, l'un travaillant à l'hebdomadaire Marianne, l'autre au Canard Enchaîné, ont enquêté sur les rapports qu'entretient Nicolas Sarkozy avec l'argent. Le livre peut être qualifié de pamphlet anti-Sarkozy et à ce titre n'engage que leurs auteurs.
Politique.net a lu pour vous « Sarkozy et l'argent roi » et en livre une analyse critique.
Selon Renaud Dély et Didier Hassoux, Nicolas Sarkozy s'est toujours évertué à s'entourer de personnes d'influence pouvant lui permettre de gravir l'échelle sociale. Ainsi, dès son arrivée à la mairie de Neuilly, Nicolas Sarkozy s'est rapproché des grands patrons de sa ville comme Martin Bouygues, Bernard Arnault, Arnaud Lagardère, François Pinault, Jean-Claude Decaux, Daniel Bouton... Il les rencontre fréquemment, les fréquente même. Martin Bouygues devient le parrain de son fils, Louis. En tant qu'avocat, il défend aussi leurs intérêts. Bernard Arnault, patron des Echos, l'un des patrons les mieux payés de France, fait partie de ses principaux clients. Par la suite, grâce à son statut de porte-parole du gouvernement Balladur, entre 1993 et 1995, il rencontre de nouvelles personnalités. C'est à cette époque qu'il se lie Alain Minc. Grâce à ses différents postes, Nicolas Sarkozy multiplie ses contacts, se crée des réseaux et devient l'ami véritable des grands patrons, au point de leur accorder de multiples avantages. Il voit ses intérêts quand il fréquente un homme riche et puissant comme Bernard Arnault, habile également en affaires. Ennemi de Jacques Chirac comme de Dominique de Villepin, le PDG a donné des conseils avisés à Nicolas Sarkozy pour évincer ses deux principaux adversaires dans la course à la présidence.
Toutefois, si Nicolas Sarkozy sait se faire aimer de ces grands patrons qui savent comment à leurs tours se rendre serviables et aimables, il ne supporte pas l'échec ni la banqueroute. Daniel Bouton, PDG de la Société Générale a été lâché par le président de la République suite à l'affaire Kerviel qui a fait perdre près de 5 milliards d'euros à la banque. Le livre, Sarkozy et l'argent roi détaille précisément comment le président de la République est entré dans une colère noire au point de « demander la tête » de Daniel Bouton et les relations qu'ils entretenaient jusqu'alors.
Il en est de même avec Edouard de Rotschild, PDG de la société organisatrice de courses France Galop et propriétaire du quotidien Libération depuis 2006. Autrefois proches, les deux hommes sont entrés en conflit ouvert après l'acquisition du journal de gauche par Edouard de Rotschild qui n'a pas changé la ligne éditoriale de Libération. Nicolas Sarkozy a pris ses distances et ne cesse de régler ses comptes avec son ancien ami.
Les auteurs du livre donnent différents exemples. On retiendra encore celui d'Arnaud Lagardère. Nicolas Sarkozy a fait la connaissance du père avant celle du fils dans les années 1980. A la mort de Jean-Luc Lagardère, le maire de Neuilly et ami de la famille accepte d'aider le fils à reprendre l'affaire et quand il arrive à Bercy, lui accorde quelques largesses. Les deux hommes sont alors au sommet de leur « amitié » mais quelques mois plus tard, ce lien manque de se briser quand Paris-Match publie les photos de Cécilia Sarkozy au bras de son amant. Nicolas Sarkozy demande alors des comptes à Arnaud Lagardère qui n'a pas pris le soin de censurer l'article ni même de le prévenir de sa publication. Finalement, c'est le directeur de la rédaction du magazine, Alain Genestar, qui a fait les frais de cette affaire. Pour tenter de retrouver l'estime de son ami, Arnaud Lagardère décide d'être plus vigilant et de surveiller tous les articles compromettants. Il fait censurer un article dans le Journal du Dimanche révélant que Cécilia Sarkozy n'a pas voté au second tour de la présidentielle. Alors qu'il veut bien faire, les rumeurs vont bon train et très vite, le candidat UMP est ridiculisé. Finalement, au soir de la victoire, Nicolas Sarkozy n'a pas invité Arnaud Lagardère au Fouquet's et le tient depuis à l'écart.
Les auteurs du livre concluent le chapitre des amitiés de Nicolas Sarkozy sur les multiples renvois d'ascenseur du président : si Vincent Bolloré n'hésite pas à prêter yacht et avions au président de la République, c'est qu'il attend en retour que celui-ci lui trouve de nouveaux marchés internationaux.
Sarkozy et l'argent roi
- La rupture présidentielle de Nicolas Sarkozy : l'argent
- Vie privée / vie publique : les "chères" amours du président
- Les « riches » amis du président
> Renaud Dély et Didier Hassoux, Sarkozy et l'argent roi, Calmann-Levy, Paris, 2008
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