Présidentielle américaine · 14 sep. 2008 à 13:19
Barack Obama et John McCain ont choisi leur colistier. Le candidat démocrate, qu'on accuse souvent d'être inexpérimenté, a choisi Joe Biden, sénateur d'expérience, élu depuis 35 ans. Le candidat républicain, dont l'âge et le conservatisme handicapent son discours sur la nécessité du changement en politique, a choisi Sarah Palin, sénatrice de l'Alaska et nouvelle star des médias depuis sa nomination. Si l'un ou l'autre des candidats l'emporte, le colistier deviendra alors vice-président des Etats-Unis d'Amérique. Mais à quoi sert un vice-président ? Comment est-il choisi ? Quel est l'impact de ces nominations à deux mois de l'élection présidentielle ?
Sunday Time, chronique n°12
Politique.net vous propose de suivre pendant un an le déroulement de l'élection présidentielle américaine en décryptant les enjeux du scrutin et le fonctionnement du système politique aux Etats-Unis. Tous les dimanches, vous retrouverez donc notre chronique "Sunday Time" qui expliquera les spécificités de la présidentielle américaine par rapport au système politique français.
Le vice-président a un rôle extrêmement réduit : il n'a pas de rôle exécutif, il n'est que le président ex officio du Sénat, c'est-à-dire qu'il préside le Sénat. Son rôle se limite au domaine de la procédure judiciaire. Parfois, le Président des Etats-Unis peut attribuer au vice-président davantage de fonctions, mais cela n'est pas inscrit dans la Constitution. Il n'est qu'un simple agent du Président, exécutant des missions pour son compte. En cas d'égalité entre les partis au Sénat, le vice-président a tout de même un rôle à jouer pour éviter le blocage de la Chambre haute : il peut intervenir et donner sa voix.
Le second rôle du vice-président est de remplacer le président en cas de vacance du pouvoir, comme le président du Sénat en France.
Il n'est guère facile de choisir son vice-président car celui-ci ne doit être ni trop présent au cours de la campagne électorale ni trop en retrait. Pour élargir l'horizon de son électorat, bien souvent, le candidat a tout intérêt à choisir un « ticket », avec qui il ne partage pas tout à fait les mêmes idées. Il peut également choisir un « ticket » qui possède des qualités propres à palier ses faiblesses. L'essentiel est de se répartir les rôles : en l'occurrence, le « ticket » doit mettre en avant le candidat, le défendre sans se mettre en avant et attirer à soi les médias. Il se cantonne essentiellement au rôle de second couteau.
Pourtant, les Américains affirment que le choix du « ticket » est primordial puisqu'il influence pour une bonne part leur vote. Le candidat à l'élection le sait d'autant plus que la plupart des vice-présidents se sont ensuite présentés à la présidentielle et ont été élus. C'est le cas, par exemple,
de George Bush père en 1988. Plusieurs vice-présidents sont également devenus présidents à la suite du décès, de la démission ou de la destitution du président. C'est le cas, par exemple, de Gerald Ford, qui a remplacé Richard Nixon en 1974 après le scandale du Watergate.
Le 23 août dernier, Barak Obama a désigné Joe Biden comme son colistier. La nouvelle a surpris mais a été accueillie avec enthousiasme par les militants. En effet, le sénateur du Delaware est l'ancien rival des primaires de Barack Obama.
Sénateur depuis 35 ans, président de la commission des affaires étrangères, Joe Biden possède une grande expérience de la politique et connaît parfaitement les dossiers qui seront abordés au cours de la campagne. Il est l'allié idéal pour un Barak Obama encore jeune en politique. Il saura comment mettre en difficulté le rival républicain, John McCain. Barak Obama l'a choisi également parce qu'il connaît très bien le Congrès : il pourra donc lui être utile au moment de faire adopter les différentes réformes prévues dans son programme présidentiel.
Enfin, Joe Biden est assez populaire : son drame familial émeut les Américains. Dans un accident de voiture, il a perdu sa femme et sa fille, ses deux garçons sont dans le coma. Depuis près de 35 ans, il ne cesse de leur rendre visite à l'hôpital, faisant la navette chaque jour entre Washington et Wilmington, la capitale du Delaware. Ce geste paternel est perçu de façon très positive auprès des électeurs.
Le choix de John McCain a surpris tout le monde. Vendredi 29 août 2008, devant les militants républicains, le candidat a annoncé que Sarah Palin serait sa colistière. La nouvelle a été reçue avec enthousiasme : Sarah Palin est une femme, de 44 ans, très chrétienne. Grâce à ce choix, John McCain a élargi son horizon électoral : la droite chrétienne s'est ralliée à lui, et les partisans d'Hillary Clinton pourraient trouver en cette femme un motif supplémentaire pour franchir le pas d'un vote républicain. Signe que le choix de Sarah Palin a relancé la campagne des républicains, les donations ont immédiatement augmenté : en deux jours seulement, 7 millions de dollars ont été versés pour financer la campagne.
Après l'annonce du nom de la colistière de McCain, les journalistes se sont intéressés à la personnalité de Sarah Palin et dès le 1er septembre, elle a été au centre d'une polémique : sa fille de 17 ans est enceinte de cinq mois. Cette découverte ne correspond guère à l'image chrétienne que la famille Palin souhaite se donner. Le scandale éclate aussitôt dans le pays puritain et différentes rumeurs courent à présent sur Sarah Palin. Une enquête concernant la démission d'un chef de police mettant en cause la colistière est ouverte. Le rapport de commission d'enquête est prévu seulement quelques semaines avant la présidentielle.
Pour autant, l'attraction que suscite Sarah Palin et les récentes enquêtes d'opinion montrent qu'après les polémiques des premiers jours, le choix de John McCain s'avère payant. Il a relancé la campagne, les deux candidats sont revenus à égalité. Et face à la déferlante Palin, Barack Obama peine à trouver la parade. Dans une élection à l'issue incertaine, le choix d'une vice-présidente va-t-il faire définitivement pencher la balance ?