Revue de presse · 6 oct. 2008 à 20:05
Les premières informations sur le contenu de la réforme du lycée sont sorties dans la presse ce week-end. La réforme, qui doit entrer en vigueur dès septembre 2009 pour la classe de seconde, s'annonce explosive. Avec un fonctionnement en semestre et la moitié des matières en option, Xavier Darcos procède à un changement profond de l'organisation du lycée, avec en arrière fond un objectif caché : amplifier les suppressions de postes de profs pour faire des économies.
En février dernier, nous vous avions expliqué la première étape de la réforme cachée de l'Education nationale. La réforme du lycée constitue la deuxième étape avec toujours le même objectif : supprimer des postes de profs pour faire des économies à l'Etat.
1. Un lycée à la carte pour supprimer les redoublements : 60% des cours seront consacrés à un tronc commun (lettres, maths, histoire-géo, deux langues vivantes et sport), 40% du reste du temps sera consacré à des modules complémentaires, choisis par l'élève. Chaque semestre, les élèves en difficulté pourront choisir d'autres matières complémentaires et auront des cours de soutien. A la fin des trois années de lycée, les élèves passeront donc un bac à la carte dans les matières où ils seront les plus forts. Dans ce système, le redoublement (qui concerne 15% des lycéens de seconde) disparaît.
2. Des matières optionnelles pour diminuer le nombre d'heures de cours : avec 40% du temps consacré aux options et 60% du temps aux matières principales, l'objectif est de diminuer le nombre d'heures de cours. Actuellement, un lycéen français a entre 28h et 35h de cours par semaine. Xavier Darcos souhaite ramener ce chiffre à 27h de cours dès la rentrée de septembre 2009.
3. L'histoire et les mathématiques disparaissent du tronc commun dès la 1ere. La réforme de la classe de première entrera en vigueur en septembre 2010. Mais déjà, les premières informations ont filtré : les mathématiques et l'histoire-géographie disparaîtront du tronc commun dès la classe de première. Ces deux matières fondamentales deviendraient donc optionnelles, ce qui constituerait une révolution du système scolaire. Jusqu'à présent, les mathématiques et l'histoire-géographie faisaient partie du bagage culturel indispensable pour un bachelier.
Pour justifier ces profonds bouleversements, le gouvernement avance un objectif partagé par toute la communauté éducative : lutter contre l'échec scolaire. Pour y parvenir, la réforme part de trois postulats : le redoublement ne sert à rien, le système de filières (L, ES, S) handicape les élèves qui ne sont pas à l'aise dans une matière qui leur est imposée, le nombre d'heures de cours est trop élevé, il empêche le soutien et l'autonomie.
L'objectif affiché est donc très consensuel et doit permettre de neutraliser les contestataires. Comme l'Education est une priorité nationale, le gouvernement ne peut avoir comme objectif la nécessité de faire des économies. Les différentes mesures de la réforme cachent pourtant mal les objectifs réels de Xavier Darcos : diminuer le nombre d'heures de cours et convertir des matières fondamentales en options pour diminuer les besoins de professeurs.
Toutes les mesures prises vont dans le même sens :
1. Fin des redoublements : la "fluidité" des parcours va permettre de mettre un terme à un remplissage "artificiel des classes". La suppression des redoublements va diminuer le nombre d'élèves scolarisés dans le Secondaire. Moins d'élèves, moins de classes, moins de profs.
2. Diminution des heures de cours : puisqu'il y a moins d'heures, il y a besoin de moins de profs (qui eux, sont poussés à prendre des heures supplémentaires afin de limiter les embauches dans l'éducation nationale).
3. Des matières fondamentales qui deviennent optionnelles : les mathématiques et l'histoire-géo n'étant plus obligatoires à partir de la classe de première, l'objectif est diminuer le nombre d'heures d'enseignement dans ces matières. Or, moins d'heures de maths et d'histoire-géo, c'est moins de profs de maths et d'histoire-géo.
La réforme du lycée s'annonce donc explosive. Pour éviter les résistances frontales, le ministre a déjà appliqué la stratégie des fumigènes, en saturant l'espace médiatique avec des mesures anecdotiques (médailles au bac, code de la paix scolaire). Quelques cadeaux ont également été distribués : 500 euros pour les enseignants qui ont pris plus de 3 heures supplémentaires et une prime d'entrée dans le métier de 1500 euros pour les nouveaux enseignants. Malgré tout, cela ne suffira pas pour éteindre la contestation. Xavier Darcos cherchera alors à discréditer un mouvement "téléguidé par des syndicats qui organisent des grèves chaque année depuis 20 ans". Fin de l'histoire.
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