Le Canard enchaîné · 9 oct. 2008 à 21:08
En pleine crise financière, le gouvernement s'inquiète de plus en plus de voir tous les compteurs virer au rouge vif : forte hausse du chômage au mois d'août, augmentation des déficits pour financer les plans d'aide aux banques, baisse des entrées fiscales en raison du ralentissement de la consommation. Pour sortir de cette impasse, les Européens ont prévu d'assouplir les critères de Maastricht pour permettre aux Etats de s'endetter davantage. Mais cela ne suffira pas. Le gouvernement tente donc de récupérer discrètement des enveloppes budgétaires essentiellement consacrées aux chômeurs et aux handicapés. Avec un système un peu complexe composé d'organismes largement ignorés par le grand public, le gouvernement espère récupérer ses fonds en toute discrétion. C'est ce que révèle le Canard Enchaîné dans son édition du 8 octobre.
Source : Alain Guédé, "Bercy siphonne les caisses des chômeurs", Le Canard Enchaîné n°4589, 8 octobre 2008
En janvier, l'UNEDIC et l'ANPE vont fusionner pour donner naissance à "France-Emploi". Ce service public, nouvelle génération, doit permettre d'améliorer le traitement du chômage et le retour à l'emploi. L'UNEDIC est une structure partiaire (gérée par les partenaires sociaux) financée par les cotisations chômage payées par les salariés. L'ANPE est une administration d'Etat. Ces deux structures de natures différentes vont fusionner au sein d'un organisme entièrement contrôlé par l'Etat.
A l'origine, l'UNEDIC devait débourser 8% de son budget pour financer la création de France-Emploi, structure d'Etat. Or, selon le Canard Enchaîné, le ministère a décidé arbitrairement d'augmenter la part de co-financement à 10%. L'UNEDIC doit donc faire une rallonge de 400 millions d'euros pour financer "France-Emploi", structure d'Etat. Autrement dit, l'Etat récupère 400 millions d'euros des caisses de l'assurance-chômage.
Ce n'est pas la première fois que l'Etat récupère discrètement des fonds dans des caisses destinées normalement aux chômeurs et à ceux qui connaissent des problèmes d'insertion. L'Etat a déjà repris, sans concertation, 50 millions d'euros à l'Agefiph, fonds d'aide pour l'insertion professionnelle des handicapés pour équilibrer les recettes du projet de loi de finances 2009. A l'époque, la CGT avait qualifié ce tour de passe-passe comptable de véritable "hold up" car cela revient à retirer à la structure 10% de son budget prévisionnel 2008-2010. Selon le président de l'Association, cette ponction de l'Etat pourrait priver 28 000 personnes à mobilité réduite d'une formation qualifiante. Cette ponction est la deuxième qui touche les handicapés. Au mois d'avril, le gouvernement avait déjà annulé 17 millions d'euros de crédits du Fonds d'insertion des personnes handicapées de la fonction publique.
Le gouvernement va s'attaquer à une troisième caisse d'aide aux chômeurs. Peu connu du grand public, il s'agit du Fonds unique de Péréquation, créé il y a plus de 30 ans par Jacques Chaban Delmas, sous la présidence de Georges Pompidou. Il s'agit d'un fonds qui récupère l'argent non utilisé par les organismes de formation professionnelle afin de le reverser aux demandeurs de congé individuel de formation. L'Etat a décidé arbitrairement de récupérer 118 millions d'euros de ce fonds pour ses propres caisses.
Au final, entre la rallonge de l'UNEDIC (400 millions d'euros), la confiscation par l'Etat d'une partie du fonds d'aide aux handicapés (50 millions d'euros) et la récupération de 118 millions d'euros du fonds d'aide à la formation professionnelle, c'est près de 600 millions d'euros que Bercy s'apprête à récupérer aux chômeurs.
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