Revue de presse · 21 oct. 2008 à 20:01
En France, la crise du logement ne date pas d'hier mais le secteur souffre d'un manque d'investissement de la part de l'Etat. Ministre du logement très médiatisée, Christine Boutin est en première ligne. Depuis des semaines, elle essuie une série de critiques d'autant plus vives que la ministre s'expose fortement. Faute d'un budget suffisant, elle multiplie les effets d'annonce, et défend des positions qu'elles critiquaient un an auparavant. Hier, les sénateurs UMP ont même voté contre la modification de la loi SRU qui oblige les communes d'avoir 20% de logements sociaux. Après cet ultime camouflet, Christine Boutin apparaît plus que jamais comme une ministre en sursis, avant le probable remaniement de janvier 2009.
- Le Figaro : Logement social : les députés UMP « bien embêtés »
- L'Express : Pour défendre la SRU, les sénateurs UMP rejoignent l'opposition
- Le Monde : Logement : la modification de la loi sur la mixité sociale divise la majorité
La loi "Solidarité et renouvellement urbains" (SRU) impose aux communes de plus de 3500 habitants (soit plus de 700 villes) de construire suffisamment de logements sociaux pour que ces logements représentent 20% du total des logements disponibles. De nombreux maires de droite n'appliquent pas cette loi et préfèrent payer l'amende plutôt que de créer des logements qui attireraient des catégories sociales populaires. A cet égard, le profil des habitants des HLM de Neuilly est éloquent. L'ancien fief de Nicolas Sarkozy compte 3,2% de HLM et parmi les locataires de ces logements sociaux, on trouve des catégories sociales aisées : châtelains, chefs d'entreprise, cadres supérieurs. D'une manière générale, la droite est donc plutôt hostile à la loi SRU, jugée trop contraignante.
Christine Boutin a donc voulu modifier la loi SRU en comptant, dans les 20% d'HLM obligatoires, les logements sociaux qui ont été vendus à leurs occupants. C'était une promesse de campagne de Nicolas Sarkozy : faire une France de propriétaire en permettant aux couches populaires de devenir propriétaires de leur logement HLM. Mais à partir du moment où un occupant devient propriétaire de son appartement, ce n'est plus un HLM. Voilà pourquoi ces propriétés n'étaient pas incluses dans les 20%.
Au premier abord, la modification de la loi SRU décidée par Christine Boutin allait donc dans le sens des élus de droite : inclure les HLM vendus permettait aux villes qui peinent à atteindre l'objectif de 20% d'y parvenir plus facilement. Pourtant, contre toute attente, les sénateurs UMP ont massivement rejeté le texte en adoptant un amendement qui supprimait la modification décidée par la ministre. 314 sénateurs UMP ont rejeté la modification, seuls 21 étaient pour.
Ce camouflet s'explique par le caractère trop polémique de cette décision, dans un contexte de crise financière et d'inquiétudes de l'opinion. Si cette modification avait été acceptée, cela aurait freiné la construction d'HLM, dont les besoins sont pourtant criants. Les sénateurs UMP ont donc refusé de rouvrir ce débat.
Sur ce sujet, non seulement Christine Boutin n'a pas réussi à convaincre les sénateurs du bienfondé de relancer ce sujet polémique en pleine crise financière, mais elle s'est elle-même contredite. Elle a proposé d'inclure les propriétés acquises par les classes populaires dans le calcul des 20% HLM. Sauf qu'en pleine campagne présidentielle, Christine Boutin avait dit exactement le contraire. C'est Le Monde qui a exhumé cette contradiction. En février 2007, la future ministre était rapporteuse du projet de loi devant modifier la SRU. Le gouvernement Villepin souhaitait déjà inclure des propriétés dans le 20% logement. Mais Christine Boutin était... contre :
"Dans le cadre de l'examen du projet de loi instituant un droit opposable au logement, qui reprend à l'Assemblée nationale, mardi 20 février, le député Yves Jego (UMP, Seine-et-Marne) a déposé un amendement assimilant à du logement social, pendant dix ans, "les programmes d'accession sociale à la propriété".
La mesure, qui pourrait être discutée lors des débats prévus mardi, est passée relativement inaperçue, puisque la rapporteuse du projet de loi, Christine Boutin (UMP, Yvelines), assure ne pas s'en souvenir. Toutefois, "à titre personnel", elle se dit défavorable à une telle disposition."
A l'époque, Christine Boutin ne se "souvenait" pas qu'un amendement avait été déposé pour modifier la loi SRU. Et de toute façon, elle y était défavorable. Un an et demi plus tard, elle a changé d'avis, pas les sénateurs UMP.
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