Revue de presse · 5 nov. 2008 à 22:05
La victoire de Barack Obama a été suivie de près par les conseillers de Nicolas Sarkozy et le staff de l'UMP. Plusieurs semaines avant le scrutin, des collaborateurs de Nicolas Sarkozy ont pu observer de l'intérieur l'organisation de la campagne des démocrates. La victoire d'Obama repose sur une organisation impressionnante mêlant campagne online et offline. Des dizaines de milliers de bénévoles se sont mobilisées pendant plus d'un an, sur le terrain et sur Internet. C'est "The Movement". Nicolas Sarkozy veut s'en inspirer pour la campagne présidentielle de 2012.
- Mediapart : L'OPA de l'UMP sur Obama
- Le Figaro : L'obamania plus forte en France qu'aux États-Unis
- Le Monde : La campagne de M. Obama inspire les conseillers de M. Sarkozy
Même s'il ne le dira jamais, Nicolas Sarkozy pense déjà à la présidentielle de 2012. En juin, le président de la République a demandé à quatre spécialistes de la communication de plancher sur la refonte de l'UMP. C'est le journal Le Monde qui a révélé l'existence de cette Task-force composée de Pierre Giacometti, ancien directeur d'Ipsos, Christophe Lambert, communicant, Jean-Michel Goudard, publicitaire, et Patrick Buisson, journaliste.
L'objectif de leur travail est de repenser le parti majoritaire. Nicolas Sarkozy avait bâti sa stratégie présidentielle en rénovant l'UMP, en facilitant les adhésions et en dépoussiérant des pratiques militantes datées. Cependant, depuis qu'il est à l'Elysée, les effectifs de l'UMP ont considérablement baissé. Nicolas Sarkozy est donc convaincu qu'en 2012, il faudra insuffler du sang neuf dans son approche politique, dupliquer la campagne de 2007 en 2012 ne suffira pas pour gagner.
L'équipe de Barack Obama a très tôt mis en ligne un site Internet et utilisé tous les réseaux sociaux pour recruter de nouveaux bénévoles. Mais contrairement aux anciennes campagnes électorales, l'équipe d'Obama ne s'est pas contentée de construire un réseau virtuel. La force du Mouvement est d'avoir réussi à convertir les internautes en bénévole de terrain. Obama a utilisé les réseaux sociaux pour quadriller le terrain, l'arme absolue étant la collecte de données internet et téléphoniques.
Le "comité stratégique" de l'UMP veut s'inspirer de cette campagne online et offline : l'UMP veut ouvrir ses portes et bâtir une structure à plusieurs niveaux pour construire un parti de masse. L'idée est de dépasser la barrière de l'adhésion à l'UMP pour inventer de nouveaux modes d'engagement : militants, sympathisants, simples internautes, l'UMP veut pouvoir réunir plus de 600 000 membres au sein d'une communauté élargie. La stratégie est donc bien de faire d'Internet la colonne vertébrale de l'UMP.
L'autre aspect sur lequel les conseillers en communication de Nicolas Sarkozy travaillent est la mise en scène du candidat. Barack Obama a renouvelé le genre en appliquant les dernières trouvailles à la mode de la communication politique : raconter une histoire, être l'acteur d'une campagne électorale écrite par des scénaristes. La politique devient un spectacle, les discours deviennent des morceaux d'une histoire écrite à l'avance. A l'exposition d'un programme précis de mesures complexes, Barack Obama a préféré "jouer" sur la corde sensible afin d'incarner lui-même le changement.
La campagne d'Obama a été pensée comme une véritable superproduction hollywoodienne avec de gigantesques rassemblements lors de discours fondateurs. A Berlin, Barack Obama a attiré plus de 200 000 personnes pour un discours rappelant celui de John Kennedy. Aux Etats-Unis, le réseau d'Obama préparait plusieurs semaines à l'avance les grandes manifestations sur le terrain pour battre chaque semaine des records d'affluence. Ce sont ces mises en scène que l'équipe de Nicolas Sarkozy souhaiteraient transposer en France en 2012.
Le travail de terrain, la collecte minutieuse de coordonnées, la construction méthodique d'un vaste réseau virtuel constituent les bases de la campagne online/offline de Barack Obama. Son organisation était pyramidale, du bas vers le haut, en impliquant les militants de base sur le terrain tout en faisant travailler ensemble les plus grands spécialistes américains dans des domaines très variés. Le staff d'Obama était composé des meilleurs spécialistes d'Internet, de la communication, de la publicité, des sondages, des finances. Les démocrates ont donc réussi à articuler l'expertise des élites et le travail de fourmi effectué par des militants de base sur le terrain. L'UMP avait déjà tenté l'expérience à petite échelle avec les "supporters de Sarkozy". En 2012, Nicolas Sarkozy souhaiterait une machine beaucoup plus performante, toute dédiée à sa réélection.
Les membres du comité stratégique de l'UMP se sont donnés un peu plus d'un an pour refonder l'organisation de l'UMP et poser les bases d'un réseau online et offline identique à celui de Barack Obama. Reste à savoir si une campagne à l'américaine est possible en France. La difficulté résidera dans l'articulation entre nouveauté, modernisation et la tradition politique et électorale propre à la France. Pas sûr que les 30 minutes de publicité d'Obama sur toutes les chaînes américaines à une heure de grande écoute auraient bien été perçues par l'opinion en France.
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