Claude Guéant, chef du gouvernement bis de Nicolas Sarkozy

Livres politiques · 20 nov. 2008 à 23:06

Claude Guéant

Dans l'Enfer de Matignon, le livre-témoignage de Raphaëlle Bacqué, François Fillon estime que le Président a le pouvoir tandis que le Premier ministre est une sorte d'arbitre qui veille à la mise en oeuvre du programme électoral. Selon lui, « le président de la République est de toute évidence, sauf cohabitation, le véritable patron dans la mesure où il a la légitimité la plus forte, où il est au sommet de la chaîne hiérarchique. Au fond, c'est lui qui exerce le pouvoir et l'autorité. Mais le Premier ministre, lui, est responsable devant le parlement ».
Aussi, Nicolas Sarkozy a mis en place une équipe de douze conseillers, avec à la tête Claude Guéant, qui imaginent et supervisent les idées du Président, passant outre les décisions gouvernementales. Dans Claude Guéant, L'Homme qui murmure à l'oreille de Sarkozy, les journalistes Christian Duplan et Bernard Pellegrin montrent combien ces « douze petits nègres » pèsent de tout leur poids dans l'organisation du pouvoir.


Série 6/8 : Claude Guéant et les 12 petits nègres

Claude Guéant

François Fillon vs Claude Guéant

Il semblerait que François Fillon estime peu le secrétaire général de l'Elysée et s'inquiète de la place que Claude Guéant occupe auprès du président de la République. Quand il apparaît dans les médias, Claude Guéant est une sorte de Chef du gouvernement bis, qui « recadre l'action du gouvernement ». Et si Nicolas Sarkozy a pu avoir des paroles sévères à l'égard de François Fillon, jamais publiquement, il n'a fait la moindre critique à Claude Guéant : les deux hommes sont clairement en compétition.
Pour être sûr d'être toujours en position de domination, le président de la République a donc créé une équipe, à l'instar du gouvernement, pour mettre en rivalité les deux camps, mais surtout avoir un vivier d'idées. Claude Guéant doit réunir chaque matin l'équipe, animer le débat et apporter des idées au président qui les exploitera aussitôt afin de donner l'impression, dans les médias, qu'il met en place une politique qui bouge sans cesse.
Pour les journalistes Christian Duplan et Bernard Pellegrin, « les conseillers frôlent la toute-puissance » puisque ce sont eux, par exemple, qui ont réglé les modalités d'application du RSA, en l'absence du principal concerné Martin Hirsch, l'objectif étant d'aller vite. Le problème pour François Fillon est qu'il ne maîtrise plus les dossiers pas plus que ses ministres.

Les « 12 petits nègres » du président

Nicolas Sarkozy innove à l'Elysée : il a demandé à Claude Guéant de réunir chaque matin ses conseillers. Leur rôle est de « l'aider à anticiper, à tenir le cap, malgré les aléas, les vents mauvais, et les inévitables tempêtes ». Pour parvenir à ses fins, Nicolas Sarkozy crée une forte émulation afin que chacun participe activement aux réunions et propose des idées pour que la France change vite et efficacement, même si certains ne s'entendent pas.
Parmi ces conseillers, Henri Guaino apparaît comme l'un des plus influents. Proche de Nicolas Sarkozy, c'est lui qui lui souffle l'idée de faire référence à Blum et Jaurès dans ses discours, lui encore qui propose de rendre hommage à Guy Moquet à l'école... Il ne s'entend guère avec Claude Guéant mais doit composer avec lui s'il veut rester au conseil du président.
On compte encore Catherine Pégard, l'ancienne rédactrice en chef du Point, conseillère politique, Emmanuelle Mignon, la conseillère spéciale, Jean-David Levitte, conseiller diplomatique, François Pérol, secrétaire général adjoint, Cédric Goubet, chef de cabinet, Raymond Soubie, conseiller social, Jérôme Peyrat, conseiller politique, Patrick Ouart, conseiller à la justice et Franck Louvrier, conseiller en communication.

Quand les conseillers... conseillent mal

Tous ces conseillers, chargés de mettre en oeuvre le programme de Nicolas Sarkozy et de lui apporter des idées innovantes, sont donc en concurrence directe avec les différents ministres puisqu'ils travaillent dans les mêmes domaines et peuvent proposer au président des idées contradictoires au risque de discréditer les décisions gouvernementales.
Mais il peut arriver que ces conseillers fassent des bourdes qui mettent Nicolas Sarkozy en difficulté comme ce fut le cas par exemple en février dernier. Le président, hors contexte, propose de « confier à chaque élève de CM2 la mémoire d'un enfant français victime de la Shoah ». L'annonce non seulement surprend mais suscite de vives polémiques. En fait, il s'agissait d'une idée d'Emmanuelle Mignon. Le président reprend l'idée qu'il estime intéressante sans imaginer ses conséquences. Les conseillers, Claude Guéant le premier, volent à son secours en expliquant que « si vous n' « annoncez » pas, les choses ne se font jamais ». Tous soutiennent donc cette politique de l'urgence et en assument les conséquences.


Christian Duplan et Bernard Pellegrin, Claude Guéant, l'homme qui murmure à l'oreille de Sarkozy, Editions du Rocher, 2008, 196 pages

*** Liens

Claude Guéant, l'homme qui murmure à l'oreille de Sarkozy
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- Un étudiant bien discret en 1968
- De la direction de la police nationale au palais de l'Elysée
- Claude Guéant / Nicolas Sarkozy : un couple improbable
- Les ennemis de Claude Guéant : déstabilisation et coups montés
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