Revue de presse · 1er déc. 2008 à 19:41
Il est loin le temps de l'élection présidentielle en 2002 quand Jean-Marie Le Pen se retrouvait en lice pour le second tour face à Jacques Chirac avec 16,86% des suffrages. Près d'un électeur sur cinq, malgré la mobilisation anti-lepéniste, avait voté FN. Mais aux élections suivantes, en 2007, les électeurs se sont détournés de Jean-Marie Le Pen. Le candidat ne fut pas qualifié pour le second tour puisqu'il n'obtint que 10,44% des voix, résultats très inférieurs à ses scores obtenus ces vingt dernières années. Le Cevifop (le centre de recherches politiques de Sciences Po) a enquêté auprès d'électeurs lepénistes pour savoir pourquoi ils s'étaient détournés de leur parti et vers quel parti ils se dirigeaient à présent.
- Le Figaro : En attendant Marine Le Pen
- Le Monde : L'ancien électorat du Front national est en déshérence
- L'Express : Carl Lang et Jean-Claude Martinez suspendus du Front national
D'après l'étude du Cevifop, les électeurs lepénistes ne se sont plus reconnus dans les propos de leur candidat en 2007. Jusqu'en 2002, il incarnait la rupture et la protestation. Mais au cours de la campagne présidentielle 2007, Nicolas Sarkozy, talonné par Ségolène Royal, a abordé les thèmes chers à Jean-Marie Le Pen. Le premier propose la création d'un ministère de l'Immigration et de l'Identité nationale, la seconde renchérit en proposant à tous les français de posséder chez soi le drapeau tricolore. Les sujets sur l'immigration, l'identité furent donc abordés et débattus au cours de la campagne si bien que Jean-Marie Le Pen ne trouva pas le moyen de se distinguer des autres candidats et de s'adresser aux exclus. Nicolas Sarkozy, le premier, parvint à attirer vers lui ces électeurs lepénistes en affirmant ne pas les diaboliser mais au contraire comprendre leurs préoccupations.
Il apparaît donc dans cette étude que sur cent électeurs représentatifs de 2002, il n'y aurait que 40 % d'entre eux qui seraient restés fidèles à Jean-Marie Le Pen en 2007. Un quart aurait voté pour Nicolas Sarkozy, 13 % à gauche et 23 % auraient voté soit pour un autre candidat soit se seraient abstenus. Les électeurs lepénistes se seraient donc retrouvés, pour la plupart, dans les discours des différents candidats.
Aux élections législatives de 2007, le Front national a perdu 83% de ses électeurs de 2002. Un quart d'entre eux s'est abstenu, 39% a choisi de voter pour l'UMP, 15% pour la gauche et 5% pour le MoDem.
Jean-Marie Le Pen comptait sur les élections municipales de 2008 pour retrouver ses scores d'autrefois et garder un certain nombre de mairie. Au lieu de cela, les électeurs ont préféré s'abstenir majoritairement. Ce n'est donc plus vers Nicolas Sarkozy qu'ils se tournent, celui-ci les ayant déçu depuis son arrivée à la tête de l'Etat, mais vers le silence, manière pour eux de manifester leur protestation à l'égard des partis qui ne répondent pas à leurs inquiétudes ni à leurs préoccupations.
Autrefois, Jean-Marie Le Pen, avec son franc-parler et son refus des conventions, s'adressait à ces Français oubliés des autres partis qui n'entendaient pas leur colère, mais aujourd'hui, ces électeurs se détournent du Front national. Ces derniers ne se reconnaissent plus dans le discours du chef du parti. Et le retour au FN de ces électeurs déçus risque d'être plus difficile étant donné le climat à l'intérieur du Parti, la succession de Jean-Marie Le Pen à la tête du parti étant ouverte en 2010.
Non seulement le Front National a perdu une grande partie de ses électeurs mais surtout, au sein même du parti, les successeurs de Jean-Marie Le Pen se mènent une guerre sans merci. Deux camps s'affrontent : les historiques du parti, traditionalistes, et les partisans de Marine Le Pen. La bataille a pris une nouvelle tournure avec la préparation des Européennes 2009.
D'un côté, la fille, Marine Le Pen, de l'autre Carl Lang, le dissident. Tous deux veulent s'emparer d'une même région : le Grand Nord-Ouest. Alors que Marine Le Pen est la candidate officielle désignée par le FN, l'ancien secrétaire général, Carl Lang, a annoncé le 13 novembre qu'il voulait lui aussi proposer sa propre liste dans la région. Ainsi deux listes nationalistes entrent en concurrence dans le Nord-Pas-de-Calais, façon de dynamiter les électeurs du FN. Sachant que les risques sont grands pour le parti de perdre les élections, Marine Le Pen a proposé un accord à Carl Lang : celui d'être numéro deux de sa liste. Mais l'ancien secrétaire général du parti a refusé, affirmant ne pas avoir confiance en Marine Le Pen. Carl Lang n'est pas le seul à être entré en dissidence.
Jean-Claude Martinez était le vice-président du FN. Le 25 septembre 2008, il a annoncé qu'il voulait être candidat à la succession de Jean-Marie Le Pen à la tête du FN. En attendant, il comptait se présenter aux élections européennes de 2009 dans la région Sud-Ouest. Faute d'avoir obtenu l'investiture, il a alors annoncé le lancement d'une liste dissidente. Depuis, Jean-Claude Martinez a été suspendu du Front national. Toutefois, pour tenter de remporter les élections, il a passé des accords avec les différents membres du parti entrés en dissidence : Carl Lang et Fernand Le Rachinel, l'imprimeur du parti. Celui-ci a démissionné du FN suite à un conflit financier avec Jean-Marie Le Pen.
Le Front national, qui a fait une percée inattendue en 2002, semble donc se marginaliser : les électeurs se sont détournés du parti pour trouver un nouveau candidat en la personne de Nicolas Sarkozy mais peu à peu préfèrent s'abstenir de voter. Les querelles au sein même du parti ne font qu'aggraver une situation déjà délicate. La relève de Jean-Marie Le Pen, à deux ans de sa retraite, n'est donc guère assurée.
Encyclopédie
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Actualités
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Vidéos en ligne
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