A quoi peut bien servir le droit au logement opposable ?

Questions d'actualité · 1er déc. 2008 à 21:55

DALO

Le droit au logement opposable entre officiellement en vigueur le 1er décembre 2008. Votée en mars 2007, la loi DALO permet à un particulier d'attaquer l'Etat en justice s'il n'a pas un logement décent. En cas de condamnation, l'Etat doit payer une amende pour ne pas avoir pu fournir un toit à chacun. Cette loi est une manière de faire pression sur les pouvoirs publics pour régler le problème du logement et accélérer les constructions. Mais quelles sont les conséquences concrètes du Droit au logement opposable ? La loi DALO est-elle une réponse efficace à la crise du logement ?


Rappel : Qu'est-ce que le droit au logement opposable ?

Depuis janvier, des commissions étudient les dossiers

Si le droit au logement opposable entre officiellement en vigueur le 1er décembre, les dossiers de recours sont étudiés depuis janvier 2008. Selon la loi, ceux qui peuvent prétendre à bénéficier du droit au logement opposable doivent répondre à l'un des six critères prédéfinis :
- être dépourvu de logement ;
- être logé dans des locaux impropres à l'habitation, insalubres ou dangereux ;
- faire l'objet d'une décision de justice prononçant l'expulsion ;
- être hébergé en structure transitoire depuis plus de six mois ;
- vivre dans un logement en sur-occupation ou non-décence manifestes avec handicapés ou enfants mineurs ;
- être en attente d'un logement social depuis plusieurs années (la durée varie selon les départements).
Dans ce cas-là, la personne peut déposer un dossier qui est examiné par une commission départementale. Si le dossier est validé, l'Etat a six mois pour trouver un logement à l'intéressé. Et à l'issue de ce délai, si le problème de logement n'est pas résolu, le particulier peut attaquer l'Etat devant le tribunal administratif.

Des critères d'urgence relativement flous et variables selon les départements

Pour l'instant, aucune enquête statistique n'a été réalisée sur le profil des demandeurs et le travail de ces commissions. Celles-ci travaillent en vase clos et refusent la plupart du temps de recevoir les journalistes. Mais le site d'information Mediapart a tout de même pu glaner quelques informations, notamment auprès des associations. Il apparaît que les critères d'urgence sont appréciés différemment selon les commissions et les départements.
Ainsi, selon les rares chiffres publiés par le ministère du Logement, 600 000 personnes environ seraient potentiellement concernées par la loi. Mais depuis janvier, seuls 50 000 dossiers auraient été déposés. Et sur ces demandes de recours, près de 40% des dossiers seraient rejetés. Selon les commissions, l'urgence n'est pas évaluée de la même manière : dans certains cas, répondre à l'un des six critères suffit pour valider son dossier. Dans d'autres cas, si la personne "dépourvue de logement" n'a pas fait de demande d'HLM, son dossier est refusé.

Condamné, l'Etat doit payer une amende... à l'Etat ?!

Au-delà de la différence de traitement des dossiers selon les départements, quelles sont les conséquences concrètes pour les bénéficiaires du Droit au logement opposable ? Lorsque le dossier est accepté par la commission départementale, l'Etat a six mois pour trouver un logement. La loi prévoit que l'Etat doit réquisitionner les HLM qui font partie du contingent préfectoral. En clair, environ 60 000 logements HLM sont directement gérés par les préfectures pour faire face aux demandes urgentes de logement. Or, ce quota ne correspond qu'à environ 10% des 600 000 personnes susceptibles de bénéficier du droit au logement opposable. Par conséquent, malgré ce délai de six mois, il y a peu de chances que l'Etat fasse des miracles, faute de logements disponibles. Passé le délai, la loi prévoit une condamnation de l'Etat. Une amende pour celui qui n'a pas obtenu son logement ? Pas exactement. Si l'Etat ne remplit pas ses obligations, il doit payer une astreinte... à l'Etat. En clair, une amende qui sera versée non pas au particulier, mais à un fonds devant permettre la construction de logements sociaux. On en revient au problème principal : la crise du logement est liée... à un manque de logements.


Formellement, si le droit au logement opposable permet à un particulier d'attaquer l'Etat en justice, dans les faits, si l'Etat n'a pas trouvé de logement dans les six mois, la condamnation en justice n'aura aucune conséquence positive pour le particulier mal-logé. Quand l'Etat est condamné, il doit verser une amende à un fonds versé géré par l'Etat pour les constructions. Il s'agit simplement d'un transfert de fonds alors que la solution à la crise du logement est avant tout politique : réorienter des crédits pour financer la politique du logement. Or, en 2009, le budget du ministère du logement est en baisse.

*** Liens

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