Livres politiques · 12 déc. 2008 à 17:07
En 2004 éclate le scandale de l'affaire Clearstream : 230 personnalités, dont Nicolas Sarkozy, sont accusées à tort d'avoir des comptes occultes dans une société de paiement luxembourgeoise. De faux listing de noms de personnalités sont donnés au juge d'instruction : elles possèderaient des comptes en banque à l'étranger, alimentés par de l'argent sale provenant d'affaires de corruption. Tout ceci n'est qu'une manipulation politique visant à nuire à différentes personnalités politiques et en particulier à Nicolas Sarkozy. Dans son livre-témoignage, Le Cabinet noir, au coeur du système Yves Bertrand (aux éditions Les Arènes), Guy Birenbaum raconte cette affaire Clearstream dans laquelle il a été mêlé malgré lui.
Série : Guy Birenbaum dans le piège de l'Affaire Clearstream
Dès le départ, quand Nicolas Sarkozy apprend que le nom de son père, Stéphane Nagy-Bocsa, apparaît dans le fameux listing, il soupçonne le cabinet noir d'être à l'origine de ce scandale afin de salir son nom. Très vite, les journaux révèlent l'information. Des proches du ministre de l'Intérieur sont persuadés que c'est Yves Bertrand lui-même qui a fourni au Point la liste des personnalités impliquées dans cette affaire.
Guy Birenbaum est également certain que le cabinet noir manoeuvre encore contre Nicolas Sarkozy : il garde en souvenir le déjeuner qu'il a passé avec le chef des RG, celui-ci n'ayant cessé de critiquer le ministre et de lancer des nouvelles rumeurs contre lui. Quand Libération vient à son tour demander des comptes à Yves Bertrand, celui-ci affirme qu'il n'était pas au courant de ce listing, que les RG ne le valident pas et qu'il n'a pas de « cabinet noir ». Bref, le patron des RG serait étranger à ce scandale.
Vient alors Dominique de Villepin. Celui qui est soupçonné de participer au cabinet noir accorde un entretien à Franz-Olivier Giesberg, le rédacteur en chef du Point, suite à l'enquête publiée sur Clearstream dans laquelle les noms des personnalités politiques impliquées ne sont pas citées. Le Premier ministre aurait traité son interlocuteur de « dégonflé ». D'ailleurs, selon lui : « Sarkozy, c'est fini. Si les journaux font leur travail, et s'ils ont des couilles, il ne survivra pas à cette affaire-là ».
Guy Birenbaum rencontre le 12 février 2005 Nicolas Sarkozy pour s'entretenir avec lui des différentes affaires qui le concernent : l'arrestation d'Yvan Colonna, la prise d'otages à Neuilly et surtout Clearstream. Le ministre sait combien Dominique de Villepin et Jacques Chirac essaient de le discréditer et de l'impliquer dans des scandales. Concernant l'affaire Clearstream, il croit connaître l'identité du corbeau : ce serait un proche de Dominique de Villepin, Jean-Louis Gergorin. Celui-ci est le vice-président d'EADS. Les deux hommes se seraient rencontrés au ministère des Affaires étrangères.
Pourtant, Jean-Louis Gergorin se défend et s'il a bien eu en main les faux listings, c'est parce qu'un certain Imad Lahoud, employé à EADS, les lui a fournis. Tandis que le premier tente, médiatiquement, de prouver qu'il est en dehors de cette affaire Clearstream, le second garde le silence.
L'affaire prend une tournure éditoriale pour Guy Birenbaum : une certaine Colette vient le voir pour publier un livre sur la version d'Imad Lahoud dans l'affaire Clearstream. L'éditeur, qui se dit « aux abois », accepte, persuadé de faire un coup éditorial incroyable à la veille de la présidentielle. Il est tellement sûr de son coup qu'il accorde à Imad Lahoud 40 000 euros d'à-valoir, somme qui permettra au bénéficiaire de payer sa caution. Le travail d'écriture commence de façon confidentielle, en ne laissant fuiter aucune information. Pourtant, un jour, le nègre rencontre Imad Lahoud en compagnie d'un officier des RG, parfaitement au courant du projet éditorial. Yves Bertrand, encore une fois, tire les ficelles de cette affaire complexe.
Fin novembre 2008, Imad Lahoud a reconnu avoir lui-même ajouté le nom de Sarkozy dans le listing... depuis le bureau d'Yves Bertrand ! (voir l'article du Point).
Dans Le Cabinet noir, Guy Birenbaum tente de retracer son histoire éditoriale l'impliquant dans l'affaire Clearstream, les manipulations de certains membres des RG pour le piéger... Ce scandale lui attire diverses mésaventures : après avoir publié Un Coupable parfait d'Imad Lahoud, il se voit gratifié d'un contrôle fiscal et de son propre licenciement.
Guy Birenbaum, Le cabinet noir : Au coeur du système Yves Bertrand, Editions Les Arènes, décembre 2008