Comment va le mineur multirécidiviste imaginaire de Rachida Dati ?

Dépêches ignorées · 9 jan. 2009 à 20:22

Multirécidiviste imaginaire

C'était le 16 octobre 2008. Invitée de l'émission "A vous de juger sur France 2", la ministre de la Justice, Rachida Dati, a évoqué le cas d'un mineur multirécidiviste incarcéré à l'Etablissement Pour Mineur (EPM) de Marseille, "ayant commis 190 délits et 52 fois condamné". Quinze jours plus tard, Le Canard Enchaîné révélait que l'EPM de Marseille avait été incapable de trouver ce mineur multirécidiviste. Contacté par l'hebdomadaire satirique, le cabinet de Rachida Dati avait reconnu à demi-mots le mensonge en affirmant qu'il "s'agissait de montrer que les mineurs en prison n'y sont pas pour vol de chocolats".


Dépêches ignorées :
- Un politique peut-il prendre des exemples imaginaires pour étayer ses démonstrations ?
- Quand Rachida Dati énonce des chiffres fantaisistes sur France 2

Une information connue en octobre et reprise par peu de médias

Après la publication de cette information le lundi 10 novembre 2008, nous avions intégré le "multirécidiviste imaginaire" dans notre baromètre DPI en nous posant la question suivante : Un responsable politique peut-il prendre des exemples imaginaires pour étayer ses démonstrations ?
Dans un premier temps, l'information n'a pas été reprise par les médias et a donc figuré à la première place de notre baromètre n°4 des Dépêches Politiques Ignorées. Puis, le site Arrêt Sur Images s'est fait l'écho des doutes sur l'existence de ce multirécidiviste... avant que LePost.fr s'en charge à son tour en allant un peu plus loin.

Le cabinet de la ministre a démenti l'information par la suite...

La rédaction du Post a contacté le porte-parole de la ministre de la Justice qui a démenti toute invention. Voilà ses propos, retranscris sur Le Post : "Ce n'est pas une invention. Elle a juste pris un exemple parmi tant d'autres afin de montrer que certains mineurs cumulent beaucoup de condamnations". Finalement, il ne fait que répéter ce qu'un conseiller de la ministre avait déjà dit au Canard Enchaîné. Et quand lePost.fr insiste, le porte-parole reconnaît qu'il "ne peut pas" donner des informations sur ce multirécidiviste.

... et évoque le cas d'un autre mineur multirécidiviste pour prouver l'existence du premier

En revanche, pour démontrer qu'il en existe bien, il affirme avoir sous les yeux le dossier d'un autre mineur multirécidiviste ayant le même profil que celui évoqué par la ministre sur France 2 : "J'ai par exemple sous les yeux le parcours d'un autre jeune homme âgé de 15 ans, vivant dans le Sud de la France et dont le casier judiciaire porte trace de 54 condamnations définitives". Joint par LePost.fr, l'EPM de Marseille a une nouvelle fois refusé de répondre aux questions des journalistes.

Alors, comment va-t-il ce mineur multirécidiviste imaginaire ?

Résumons : L'EPM de Marseille s'est refusé par deux fois à commenter l'affaire publiquement (mais n'a pas trouvé trace de ce mineur selon le Canard Enchaîné). Le cabinet de Rachida Dati ne peut donner d'informations sur ce mineur mais affirme qu'il en existe d'autres. En clair, le mineur multirécidiviste imaginaire a des cousins, même pire que lui (54 condamnations contre 52).

Questions simples : si Rachida Dati n'a rien inventé, pourquoi est-il si compliqué d'obtenir les informations ? Pourquoi l'EPM de Marseille persiste-t-il dans son silence ? Pourquoi prouver l'existence d'un délinquant en prenant d'autres exemples de délinquants ? Finalement, il y a deux hypothèses :
- soit le mineur multirécidiviste de l'EPM de Marseille n'existe pas. Dans ce cas, on saura la prochaine fois qu'une ministre a besoin d'inventer des profils-type pour convaincre les citoyens.
- soit le mineur multirécidiviste de l'EPM de Marseille existe bien. Dans ce cas, la communication du ministère est particulièrement tordue et alimente la suspicion.

Rappel du Baromètre des Dépêches Politiques Ignorées - n°04

1. Sur France 2, Rachida Dati invente un mineur multirécidiviste imaginaire
2. Depuis 2006, une nouvelle loi sur deux est inapplicable, faute de décrets d'application
3. Le gouvernement siphonne 600 millions d'euros des caisses des chômeurs et des handicapés
4. Taxe de 1,1% pour le RSA : l'Etat va récupérer 1 milliard d'euros pour ses caisses en 2009
5. Le Sénat gère une cagnotte de 1,5 milliard d'euros
6. Les salaires des collaborateurs de l'Elysée ont augmenté de 50% en deux ans
7. Le Parti Socialiste a des problèmes avec son fichier d'adhérents baptisé Rosam

Classé SANS SUITE
Déclaration de patrimoine : Jacques Chirac plus pauvre en 2007 qu'en 2002
Education nationale : les manipulations du ministère pour supprimer des postes de profs


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> Pourquoi avons-nous lancé un baromètre des Dépêches Politiques Ignorées ?

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