Zapping radio · 26 jan. 2009 à 22:11
Il fallait s'y attendre. En entretenant des liens ambigus avec l'homme d'affaire Pierre Bergé, Ségolène Royal s'exposait nécessairement à la critique sur son rapport à l'argent. Eric Woerth s'est engouffré dans la brèche en s'interrogeant, au cours d'une interview diffusée sur Radio J le dimanche 25 janvier 2009, sur la nature des relations qui unissaient l'homme d'affaire Pierre Bergé à Ségolène Royal.
"Pierre Bergé a ses amitiés, c'est un homme estimable. Il peut aider qui il le souhaite mais ça pose la question du rapport entre l'argent et la politique finalement (...) Ségolène Royal s'est beaucoup émue de ce rapport entre l'argent et la politique donc il faudra aussi qu'elle éclaircisse tout cela bien évidemment (...) comment elle fonctionne sur le plan financier. J'imagine qu'elle aura à coeur de le faire. Le tout, c'est de respecter la loi". Et le ministre d'ajouter que si Désirs d'avenir est un parti politique "les aides des particuliers sont plafonnées à exactement 7 500 euros par an, c'est la loi". Or, comme Désirs d'avenir ne l'est pas, le soutien financier de Pierre Bergé n'entre pas dans ce cadre. Eric Woerth le sait mais il entretient volontairement le flou.
Cette sortie du ministre des comptes publics est intervenue le jour même de la publication d'une interview de Pierre Bergé dans le JDD au cours de laquelle l'homme d'affaire expliquait dans quelle condition il soutenait Ségolène Royal :
"Avant, pendant les primaires socialistes, j'ai contribué à la soutenir. J'ai financé les locaux de l'association Désirs d'avenir. Après la présidentielle, j'ai décidé de continuer à aider Ségolène. Elle avait engrangé 17 millions de voix et on voulait la tuer ! (...) Aujourd'hui je mets à sa disposition de nouveaux locaux, boulevard Raspail. Je ne sais pas exactement combien cela me coûte... J'ai aussi participé au financement du Zénith pour la fête de la Fraternité en septembre dernier [et] Si Ségolène a besoin de moi aujourd'hui, je ferai les choses dans la légalité, mais je ferai sûrement quelque chose pour l'aider financièrement".
En attaquant Ségolène Royal sur ce sujet, Eric Woerth n'a fait qu'exploiter une faille de l'ex-candidate à la présidentielle. Le 5 janvier 2009, dans un article intitulé "Ségolène Royal et Pierre Bergé : un responsable politique peut-il avoir un mécène ?", nous nous interrogions déjà sur la question du mécénat en politique. Si l'aide financière apportée par Pierre Bergé est légale, la question de la légitimité de cette aide est posée dans le cadre d'une démocratie transparente où le financement public d'une carrière politique est très encadré (au moment des élections notamment).
Faute d'une clarification nécessaire, Ségolène Royal entretient le doute sur la collusion entre la politique et les milieux d'affaires. Or, ces critiques étaient justement formulées par la gauche contre Nicolas Sarkozy. La droite pourrait ainsi retourner la critique contre la gauche lors de la prochaine présidentielle par exemple. Eric Woerth vient de tester l'argument.
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Note de rappel :
Sur le thème "l'argent et les politiques", nous n'en sommes pas à notre coût d'essai. Quelques exemples...
- Vincent Bolloré, le nouvel ami milliardaire de Nicolas Sarkozy
- Absent du congrès de Reims, DSK préfère Washington et les 500 000 dollars annuels
- Ministère de l'Education : les dépenses inconsidérées de Jack Lang
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DOSSIER : Le tabou de l'argent du pouvoir