Vidéos · 28 jan. 2009 à 20:57
En une semaine, Roselyne Bachelot a été la vedette de deux vidéos mises en ligne sur la toile. Dans l'une, elle ose un trait d'humour sur Martine Aubry et se montre décontractée. Dans l'autre, elle apparaît cassante avec les journalistes, voire antipathique. Ce sont deux vidéos visibles sur le net... enfin presque. L'une est en accès libre sur Dailymotion et a été reprise par de nombreux sites vidéos. L'autre est sur le compte "pro" de Dailymotion du site Arrêt Sur Images, la vidéo n'est donc pas exportable sur les autres sites d'information. Ces vidéos ont deux statuts différents, donc deux publics différents. Et le hasard fait que la vidéo où Roselyne Bachelot apparaît le moins sympathique est celle qui est la plus confidentielle.
Explications.
Au cours d'une interview diffusée sur Public Sénat, Roselyne Bachelot a souhaité à Martine Aubry de se "casser la gueule" à la tête du Parti socialiste, le tout avec le sourire. Cette sortie de la ministre de la Santé a été reprise par plusieurs sites internet spécialisés dans la diffusion de vidéos-buzz (comme DeSourceSure ou LePost.fr). Plus surprenant, cette vidéo a fait l'objet d'une dépêche AFP. Du coup, tous les sites de presse, ou presque, ont repris à leur compte cette information : Le Figaro, NouvelObs, Marianne 2, entre autres. Et voilà comment l'AFP transforme une vidéo "sympathique" en buzz officiel.
Voici la vidéo :
Une semaine avant ce buzz, le jeudi 22 janvier 2009, le Petit Journal de Canal + diffusait des images de la cérémonie de voeux de la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot. Mais contrairement à la première vidéo, la ministre apparaît beaucoup moins sympathique : très cassante avec les journalistes, elle prend de haut chacune des questions et fait clairement comprendre aux journalistes qu'ils sont à la limite de l'incompétence. Ces images, vous ne les avez sans doute pas vues car un seul site internet les a diffusées, il s'agit d'Arrêt Sur Images. Le site de décryptage des médias fondé par Daniel Schneidermann propose chaque jour des contenus gratuits (le reste du site est payant, 30 euros par an, abonnez-vous) dans la rubrique "vite dit". A la différence du reste du site, cette rubrique ne comporte pas d'archives. De fait, si vous ne consultez pas la brève dans les 48 heures, il est peu probable que vous puissiez la retrouver dans les méandres des moteurs de recherche. Elle est ici, et en voici des captures d'écran :
A une journaliste de l'AFP, Roselyne Bachelot lui dit qu'elle s'est déjà exprimée sur la démographie médicale et lui glisse à la fin : « Vous êtes une novice, on va vous réexpliquer »
A une journaliste radio qui travaille pour une émission consacrée aux handicapés, Roselyne Bachelot lui fait remarquer qu'elle n'est pas en charge du dossier : « Vous savez que le périmètre du ministère a changé, mais peut-être n'êtes-vous pas au courant ».
A une étudiante en journalisme, elle n'hésite pas à lui dire : « Vous ne connaissez pas très bien les questions de santé, hein ! ».
A d'autres journalistes : « Faut vraiment réviser vos chiffres »
Et à la fin de sa tournée des journalistes, Roselyne Bachelot n'en peut plus...
La vidéo "Bachelot et la presse" a été mise en ligne sur le compte professionnel d'Arrêt Sur Images. Il s'agit d'une vidéo privée qui ne peut être exportée sur d'autres supports. Question : pourquoi ces images n'ont-elles pas été mises en ligne sur la version publique de Dailymotion ? Tout simplement parce que Canal + (qui diffuse pourtant un zapping quotidien constitué d'images des autres chaînes) demande systématiquement à ce que les vidéos de ses émissions soient retirées (exemple avec Xavier Darcos et les maths, ou Rachida Dati s'ennuyant au conseil de Paris). Résultat : des comptes pros, type Arrêt Sur Images, peuvent assumer de mettre ce type de vidéos puisqu'ils en sont les seuls responsables... à leurs risques et périls. Si Canal + veut faire disparaître cette vidéo, il faudra que la chaîne le demande directement à Arrêt Sur Images (et non à Dailymotion, qui décline toute responsabilité).
Officiellement, on ne devrait mettre en ligne que des vidéos dont on possède les droits. En l'occurrence, la vidéo où Roselyne Bachelot souhaite à Martine Aubry de « se casser la gueule » a été mise en ligne sur le compte de "Public Sénat", le diffuseur. Mais si un autre internaute avait décidé de la mettre en ligne, formellement il n'en aurait pas eu le droit (c'est la théorie, car en pratique, la plupart des vidéos sont postées sans l'accord du diffuseur). Quant à la deuxième vidéo, sans Arrêt Sur Images, on n'aurait eu aucune chance de la voir en ligne, Canal + refusant toute reprise d'extraits de ses émissions sur les sites de partage de vidéos.
Le site Arrêt Sur Images prend-il alors un risque en la mettant en ligne ? A priori pas vraiment car le principe du copyright cohabite avec celui du "droit de citation". En clair, on aurait le droit de (citer) mettre en ligne des images au sein d'une oeuvre citante, c'est-à-dire à condition d'en faire une analyse critique. C'est la position du site Arrêt Sur Images. Sauf qu'entre le copyright et le droit de citation, les interprétations divergent et le nombre de vidéos politiques effacées sur Dailymotion est impressionnant. Ce sera l'occasion pour Politique.net de mener une double enquête à la fois sur les vidéos politiques effacées (on prépare une série sur ce thème) et sur le statut juridique des vidéos en ligne (à lire prochainement).
POST-SCRIPTUM : Les captures d'écran proviennent de la vidéo mise en ligne sur le site d'Arrêt Sur Images. Nous vous engageons à retrouver l'intégralité de la vidéo sur le site.
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