breve · 12 fév. 2009 à 16:15
Une semaine après l'émission « Face à la crise » avec Nicolas Sarkozy, on en sait un peu sur les conditions de sa réalisation. En guise de préambule de notre mini-série sur les erreurs de Nicolas Sarkozy lors de cette intervention télévisée suivie par 15 millions de téléspectateurs, entrons dans les coulisses de l'émission : les conditions de tournage, le coût, le débriefing de Nicolas Sarkozy et le zèle de l'UMP.
Lors de l'émission du 5 février 2009, Nicolas Sarkozy a utilisé son arme favorite : le bon sens. Etre capable de convaincre le téléspectateur qu'il fait simplement preuve de pragmatisme, que tout va de soi. La logique est imparable, la mécanique du raisonnement est bien huilée. Le discours est cohérent et les arguments de « bon sens » s'enchaînent. Mais comme souvent avec Nicolas Sarkozy, le diable se cache dans les détails. Entre la présentation d'une mesure et la réalité de la réforme, il y a souvent un décalage. Décryptage en 5 volets.
Mini-Série 1/6 : "Face à la crise", les coulisses du Sarko Show
L'émission retransmise par TF1, France 2 et M6 a coûté 280 000 euros. Cette facture a été payée par les trois chaînes de télévision. Les patrons de ces groupes audiovisuels étaient présents à l'Elysée où ils ont eu droit à un buffet dan le Salon Murat décoré de quatre grands écrans plats pour leur permettre de suivre la retransmission de l'émission en direct. S'agissant des conditions de tournage, le Point révèle que le public qu'on apercevait en plan de coupe était composé exclusivement du personnel de l'Elysée (chauffeurs, assistantes, collaborateurs). Ce choix est crucial car le public est censé acquiescer lorsque Nicolas Sarkozy avance une idée.
Une fois l'émission terminée, le Canard Enchaîné raconte que l'UMP a envoyé un SMS à 150 000 de ses militants pour se réjouir de la prestation du président. Le texto était libellé ainsi : "Le Mouvement populaire salue l'intervention de Nicolas Sarkozy et soutient son action". L'information devait être capitale puisque l'UMP n'a pas hésité à débourser 15 000 euros pour envoyer ce message alors que le parti est l'un des plus endettés du paysage politique français.
Le Canard Enchaîné raconte comment le chef de l'Etat a préparé cette intervention capitale, une semaine après le succès de la grève générale. "Sarko a suivi, avant l'émission, une préparation digne d'un sportif de haut niveau : séance kiné, massage de détente, travail avec des comportementalistes. Sans oublier la prise de médicaments pour prévenir la sudation". Ce petit dopage et ce travail sur soi semblent avoir payé puisque le Figaro soulignait le 7 février 2009, qu'il était "plus en retenue que d'habitude (...) sa gestuelle et son discours étaient plus sobres".
Selon le Canard Enchaîné, à l'issue de sa prestation, Nicolas Sarkozy était plutôt content de lui. Ravi de l'audience et du sondage Le Figaro/Opinion Way, il s'est félicité de voir qu'il y a "plus de français qui [lui] font confiance que de Français qui soutiennent le contre-plan de relance du PS. C'est la donnée essentielle" selon lui. Mais le lendemain, quand les mauvais sondages sont tombés, Nicolas Sarkozy enregistrant une forte baisse de sa cote de popularité, le chef de l'Etat a changé de ton. Selon l'hebdomadaire, il s'en est pris à ses conseillers en communication (notamment Pierre Giacometti) qui avaient orchestré la mise en scène : "C'était ringard. Les journalistes avaient mille ans ; ils étaient fatigués, atones (...) J'ai même failli m'ennuyer. Mais j'ai dit ce que je voulais" aurait-il confié à des proches. (Voir notre article sur les méthodes du Canard Enchaîné pour obtenir les propos rapportés).
Voilà pour la forme. Sur le fond, le chef de l'Etat a commis plusieurs erreurs et gonflé les chiffres du plan de relance. Début du décryptage demain avec le deuxième volet de cette série : "Nominations du patron de France télévisions : le petit mensonge de Nicolas Sarkozy".