Livres politiques · 8 avr. 2009 à 19:11
Alors que Jean-Pierre Elkabbach, le « meilleur interviewer de France » et la « star de l'info », s'apprête à quitter la direction de Public Sénat, Vincent Quivy fait paraître (aux éditions du Moment) un portrait à charge intitulé Profession : Elkabbach. La thèse du journaliste repose sur le fait que Jean-Pierre Elkabbach a pu mener une si longue carrière - d'une cinquantaine d'années - grâce à ses accointances avec les différents chefs d'Etat qui se sont succédés des années 1960 à aujourd'hui. Même si J.-P. Elkabbach revendique avoir toujours travaillé en toute indépendance, Vincent Quivy tente de montrer qu'il est non seulement « employé des politiques » mais aussi « soumis au pouvoir ».
Série 1/7 : Le livre à charge contre Jean-Pierre Elkabbach
Contrairement à la plupart des biographies, le journaliste et auteur de L'Impossible Monsieur Borloo (L'Archipel, 2006), a préféré ne pas avoir recours à un classement thématique ni chronologique. Le livre remonte le temps : des années contemporaines aux années 1960. Vincent Quivy veut certainement faire un état des lieux : il présente Jean-Pierre Elkabbach aujourd'hui, pour mieux retracer son parcours et montrer son ascension au sein du journalisme et des médias. Vincent Quivy a eu également l'idée d'intituler tous ses chapitres de la même manière, seul le nom du président de la République change : « Portrait du journaliste en sarkozyste, en chiraquien, en mitterrandien, etc. ». L'objectif de Vincent Quivy est d'insister ainsi sur le fait que Jean-Pierre Elkabbach, contrairement à ce que disent les Guignols de l'Info sur Canal + n'est pas un Sarkozyste convaincu : il se range, à chaque nouveau mandat, derrière le président élu. Le livre dénonce les pratiques d'un journaliste prêt à faire toutes les concessions pour accéder au pouvoir.
Selon Vincent Quivy, Jean-Pierre Elkabbach aurait le goût du pouvoir et de la réussite. Pour obtenir les postes les plus convoités, il n'hésite pas à jouer des coudes voire à convoiter directement les personnes susceptibles de lui attribuer un poste intéressant. En 2006, lorsqu'il est PDG d'Europe 1, il aurait demandé conseil au ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy avant de choisir le nouveau chef du service politique de la station radio.
Si le journaliste reconnaît sans peine à Jean-Pierre Elkabbach une très vaste culture générale, une connaissance pointue de la politique nationale et une capacité de travail phénoménale, il lui reproche toutefois son amitié voire sa bienveillance à l'égard des présidents. Or, cette familiarité avec les présidents - de droite comme de gauche - l'aurait poussé parfois à affirmer haut et fort son point de vue lors des émissions qu'il anime au lieu de respecter son droit de réserve. Il aurait ainsi suscité à Europe 1, pendant la dernière campagne présidentielle, la colère de certains membres de la rédaction qui n'ont pas apprécié la manière dont étaient traités certains dossiers.
De même, à travers les différents chapitres du livre, il est question de la personnalité égocentrique et parfois tyrannique d'un Jean-Pierre Elkabbach qui n'hésiterait pas à humilier certains de ses collaborateurs, à se mettre en avant aux détriments des autres : « il avait ce côté m'as-tu-vu qui lui valait beaucoup d'ennemis, y compris dans la rédaction, surtout dans la rédaction » (propos de Robert Pietri).
D'aucuns pourraient reprocher à Vincent Quivy d'avoir écrit un portrait à charge contre un homme quasi à terre mais le journaliste s'en défend : « si effectivement, son éviction de la présidence d'Europe 1 au printemps 2008 marque la fin d'une époque et représente, incontestablement, le crépuscule d'une carrière, Jean-Pierre Elkabbach n'est pas homme à prendre sa retraite pour aller cultiver son jardin ». Pourtant, les rumeurs laisseraient entendre que le « meilleur interviewer de France » cèderait son émission politique à la rentrée prochaine sur Europe 1...
Vincent Quivy, Profession : Elkabbach, Editions du Moment, février 2009, 219 pages