Livres politiques · 13 avr. 2009 à 14:37
Dans Profession : Elkabbach, Vincent Quivy retrace le parcours du « meilleur interviewer de France ». Selon l'auteur du livre, Jean-Pierre Elkabbach a toujours fait en sorte de plaire aux présidents de la République. En 1981, qualifié de Giscardien, il connaît la disgrâce. Mais rapidement, il va réussir à nouer des liens avec François Mitterrand, au point de réaliser une série « Conversations avec un président », diffusée après la mort de celui qui sera resté 14 ans au pouvoir.
Série 4/7 : Comment Elkabbach s'est rapproché de Mitterrand
Après son départ forcé de la télévision, Jean-Pierre Elkabbach semble décidé à retrouver une place dans les médias et pour cela, il souhaite tisser des liens avec le premier président socialiste de la Vème République : François Mitterrand. Il sait que c'est en cultivant ses relations avec l'Elysée qu'il pourra se retrouver de nouveau au-devant de la scène. Grâce à sa patience et à l'opportunité, il y parvient. En février 1982, il est reçu à l'Elysée par François Mitterrand qui s'enquiert de sa situation depuis son éviction de la télévision, se sentant en partie responsable. Selon les différents témoins, François Mitterrand s'est laissé séduire par ce journaliste épris de culture, incapable d'écrire véritablement. De son côté, Jean-Pierre Elkabbach « finit par adorer le type qu'il a combattu durant plusieurs années ». Et Vincent Quivy, obsédé par la même idée, de conclure : « Durant tout le temps où Mitterrand n'était pas au pouvoir... »
Dès lors, leurs liens se nouent au point que Jean-Pierre Elkabbach dira qu'il est devenu une sorte de confident du président. Ensemble, ils s'entretiennent de conversations confidentielles, jusqu'au jour où le journaliste propose à François Mitterrand d'enregistrer une série d'entretiens filmés « destinés à l'Histoire » intitulée Conversations avec un président, diffusée en 2001. Ces confidences suscitent la critique puisque aucune révélation ne sera faite. Le journaliste se justifie : « Un homme d'Etat ne peut jamais tout dire ».
Pour réaliser ses Conversations avec un président, Jean-Pierre Elkabbach s'est entrenu plusieurs heures avec François Mitterrand entre 1993 et 1994. Vincent Quivy fustige le journaliste qui n'a pas osé poser les questions qui fâchent et faire un véritable travail, objectif, sans se mettre au service du chef d'Etat. Ainsi, Jean-Pierre Elkabbach n'a-t-il pas abordé des sujets polémiques comme les écoutes téléphoniques ou l'existence de sa fille Mazarine. Concernant les écoutes téléphoniques, Vincent Quivy ne comprend pas comment le journaliste a pu passer à côté d'un sujet qui fait la une des journaux... Et d'en conclure donc : « on voit bien là le fonctionnement de l'interviewer privilégié qui dit pouvoir « tout demander » mais reste bizarrement dans les cadres définis de l'interviewé. Sous ses airs pugnaces, il demeure gentiment docile ». Pour finir, il révèle que les héritiers du Président ont exigé « un droit de regard » ainsi qu'un contrat stipulant que la série « respecte la mémoire de l'oeuvre et de l'action du président François Mitterrand ».
En 1993, Jean-Pierre Elkabbach est nommé à un poste très convoité : celui de président de France Télévision. Dans le contexte politique de l'époque, le choix est complexe. On sort des élections législatives donnant vainqueur l'opposition : François Mitterrand désigne Edouard Balladur à la tête du gouvernement. Si le CSA est chargé de nommer le président de France Télévision, c'est toutefois le chef d'Etat qui donne son dernier mot. Cette nomination revêt donc un caractère politique. Au départ, il semblerait que le favori soit Jean-Marie Cavada, soutenu par le ministre de la Communication, Alain Carignon. Mais François Mitterrand souhaiterait au contraire imposer son choix en prenant une personne moins marquée à droite. C'est Jean-Pierre Elkabbach, proche du Premier ministre, qui est désigné président de France Télévision.
Vincent Quivy, Profession : Elkabbach, Editions du Moment, février 2009, 219 pages