Enquête · 29 sep. 2009 à 19:56
Le cumul des mandats est le serpent de mer de la vie politique française. Tout le monde reconnaît qu'il faut mettre fin à cette spécificité française extrêmement coûteuse pour l'Etat mais aucun gouvernement n'a réussi à en venir à bout. Sous Jospin, le cumul des mandats a été limité à un mandat national et un mandat local. On ne peut pas être député, maire et président du Conseil général. Mais cette limite est imparfaite dans la mesure où à l'échelon municipal, plusieurs mandats ne comptent que pour un (maire + président de Communauté d'agglomération par exemple).
Faute de règle stricte de non cumul, les électeurs doivent s'en remettre à la parole des responsables politiques, qui promettent souvent de ne pas cumuler... avant de le faire. Dominique Voynet est dans ce cas-là. La sénatrice verte s'était engagée à respecter les règles internes des Verts et à quitter son poste de sénatrice en cas de victoire aux municipales de Montreuil en 2008 afin d'être "une maire à plein temps". Une fois élue, Dominique Voynet a décidé de cumuler. Et on l'a comprend puisqu'elle perçoit 8 768 euros brut par mois pour ses deux mandats. Mais la sénatrice-maire aurait pu toucher plus...
Le magazine Capital a publié les salaires des principaux responsables politiques et ceux de 500 élus locaux en mai 2009. La presse s'en est fait l'écho de manière très partielle et ces informations sont aussitôt retombées dans l'oubli. Parce que nous considérons que ces informations sont intéressantes en soi, sans chercher à dénigrer tel ou tel responsable politique, ni à tomber dans la dénonciation facile des privilégiés de la République, nous allons publier dans le détail les revenus de 60 responsables politiques de premier plan.
Série 9/60 : Le revenu de Dominique Voynet
Depuis septembre 2004, Dominique Voynet est sénatrice de Seine-Saint-Denis. A ce titre, elle touche un salaire de 7 008 euros brut par mois selon le magazine Capital.
Avec 54.2% des voix contre 45.8% pour la liste du maire sortant Jean-Pierre Brard, Dominique Voynet est élue maire de Montreuil en mars 2008. Alors qu'elle s'était engagée être "un maire à temps plein" pendant la campagne électorale, laissant entendre qu'elle démissionnerait de son poste de sénatrice, Dominique Voynet a décidé de cumuler. Officiellement pour éviter de faire perdre aux Verts l'un des 5 postes de sénateur. On peut également ajouter que ce n'est pas une mauvaise opération financière. En plus de son salaire de sénatrice, Dominique Voynet touche 1 760 euros brut en tant que maire de Montreuil. Au total, ses revenus s'élèvent donc à 8 768 euros brut par mois. Et encore, elle aurait pu gagner plus...
Comme le souligne Capital, le salaire de Dominique Voynet à Montreuil est faible : "L'élue verte s'est fait attribuer la même indemnité qu'à ses adjoints, alors qu'elle aurait théoriquement droit à 6 042 euros". Sachant qu'elle avait promis de ne pas cumuler les mandats, on peut supposer que Dominique Voynet a voulu écarter le motif financier de ce cumul en renonçant à toucher le maximum des indemnités autorisé par le loi et en étant payé autant que ses adjoints.
Si Dominique Voynet avait touché 6 042 euros d'indemnité pour son poste à Montreuil en plus de son salaire de sénatrice, elle aurait perçu théoriquement 13 050 euros brut par mois. Le revenu d'un sénateur étant plafonné à 9 730 euros selon Capital, elle aurait versé le surplus à d'autres élus de son choix comme le veut le bon vieux principe de l'écrêtement (un élu peut verser en toute légalité le surplus de ses indemnités à un autre élu, c'est ce que fait par exemple Dominique Estrosi).
A première vue, Voynet a donc consenti à un effort financier pour compenser sa promesse non tenue de ne pas cumuler les mandats. Mais la sénatrice-maire n'est pas perdante pour autant...
Actuellement, la sénatrice touche 8 768 euros brut par mois. Cas d'école : si elle avait démissionné de son mandat de sénatrice comme elle l'avait promis et s'était accordée l'indemnité la plus haute pour son poste de maire de Montreuil, Dominique Voynet aurait touché au maximum 6 042 euros brut par mois.
Or, en cumulant les deux mandats, et malgré une indemnité municipale relativement faible, Voynet gagne 8 768 euros brut par mois. Le gain n'est donc pas négligeable puisqu'au total, son salaire fait un bond de 2 700 euros. Certes, avec deux emplois.
Mais le non respect de la promesse de Dominique Voynet montre que le cumul des mandats n'est pas prêt d'être interdit.
Source : le magazine Capital - mai 2009 - page 88
Le cumul des mandats est une pratique très répandue...
- Le cumul des mandats : une pratique extrêmement coûteuse pour la République
- Un élu local d'une commune de 6 000 habitants peut toucher 7 000 euros par mois
- Jean-François Copé et Laurence Ferrari : face à face musclé sur le cumul des mandats
- Cumul des mandats : Renaud Muselier, directeur d'hôpital, député, maire d'arrondissement, vice-président d'agglomération
Les salaires des autres responsables politiques...
- Copé : 9 730 euros brut par mois, 200 000 euros d'honoraires d'avocat par an
- Estrosi : 18 000 euros brut par mois, et une promesse de non-cumul pas respectée
- Revenu de Laurent Fabius : 12 930 euros brut par mois, sans compter la gestion de deux SCI
- Retraite de Rocard : 16 100 euros brut par mois, sans compter les cachets de ses conférences
- Salaire et retraite d'Alain Juppé : 15 337 euros par mois, sans compter les droits d'auteur
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L'argent du pouvoir Saison 2 : Présentation de la Série 2009
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