Le Canard enchaîné · 9 déc. 2009 à 23:24
En France, le financement des partis politiques a été modifié dans les années 1990. Le montant des subventions publiques dépend des résultats aux Législatives. Pour le reste, les partis peuvent recevoir des dons de particulier, jusqu'à 7 500 euros par an. Les personnes morales ne peuvent contribuer au financement d'un parti ou d'une campagne des candidats afin d'éviter toute forme de corruption.
Toutefois, les responsables politiques savent contourner ce système de financement très règlementé. Comme l'a indiqué le Canard enchaîné dans son édition du 2 décembre, si un particulier ne peut donner que 7 500 euros par an, il peut donner en revanche à autant de partis politiques qu'il le souhaite. Et les partis politiques peuvent financer d'autres partis politiques, sans limite de plafond. Voilà pourquoi il existe plus de 230 partis politiques en France et que la plupart des hommes politiques de premier plan en ont un, voire plusieurs. C'est le cas de Nicolas Sarkozy.
Comment Nicolas Sarkozy a-t-il financé sa campagne présidentielle en 2007 ?
L'essentiel de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy a été financé par l'UMP. Mais il avait également le soutien de deux structures ayant le statut de parti politique et dont la plus importante a pour nom "Association de soutien à l'action de Nicolas Sarkozy". Selon le Canard enchaîné, elle est "basée à Bruges (Gironde), [elle] dispose d'un site Internet et affichait en 2007 (dernier chiffre connu) un budget d'un peu plus de 250 000 euros". Cette somme non négligeable a pour fonction de financer les campagnes de Nicolas Sarkozy de deux manières : soit en reversant des fonds à l'UMP, sans plafond maximal, soit en reversant la somme directement sur le compte de campagne. Dans les deux cas, tout est légal, l'objectif étant de pousser les donateurs de l'UMP a contribué également à cette structure. Autrement dit, en ayant créé ce parti fantôme, Sarkozy peut recevoir théoriquement deux fois 7 500 euros, soit 15 000 euros. Et encore, ce n'est pas le seul parti fantôme qui le soutient...
La deuxième structure ayant le statut de parti politique s'appelle "l'Association nationale des amis de Sarkozy". Comme le précise le Canard enchaîné, "ce second parti semble, lui, en sommeil. Fondée en 2002 et située à Limoges (Haute-Vienne), cette organisation de masse a pour président un certain Christian Estrosi et comme trésorier... Brice Hortefeux. En 2007, son budget ne dépassait pas les 70 000 euros".
Malgré cette somme plutôt modeste, la commission des comptes de campagne avait rappelé à l'ordre cette structure car elle utilisait un compte "Paypal" pour recueillir des dons sur internet. Or, ce système très utilisé sur le web a comme inconvénient de garantir l'anonymat du donateur. De fait, il était impossible de vérifier si l'argent venait effectivement de particulier ou de personnes morales.
C'est tout le paradoxe des responsables politiques. Le mode de financement des partis a été entièrement revu dans les années 1990 pour assainir les finances des partis. Mais ceux-là même qui ont modifié les règles ont aussitôt trouvé un stratagème pour les contourner.
Source : Didier Hassoux et Jean-Michel Thénard, "Ces faux partis politiques qui servent de vraies tirelires", Le Canard enchaîné n°4649, 2 décembre 2009