breve · 5 juil. 2010 à 22:47
Et si le scénario échafaudé par une partie de la presse n'était pas le bon ? Les démissions surprises d'Alain Joyandet et de Christian Blanc ont été perçues comme une manière de donner des gages à l'opinion après toute une série de polémiques suite aux révélations du Canard enchaîné. Nicolas Sarkozy aurait décidé de sacrifier les deux secrétaires d'Etat pour mieux protéger l'autre ministre dans la tourmente, Eric Woerth. C'est la théorie des fusibles.
Sauf que, selon Le Monde, la théorie selon laquelle le coup a été préparé par Sarkozy pour se donner de l'air avant le remaniement d'octobre ne tient pas. Car Sarkozy ne serait pas à l'origine de ses démissions. C'est ce que raconte Raphaëlle Bacqué en page 3 du quotidien :
Sarkozy a prévu un remaniement pour le mois d'octobre. Aux députés UMP, il fait une annonce très claire : "certains comportements ministériels ne m'ont pas plu du tout. J'en tirerai les conséquences sévèrement au moment que j'aurai choisi !" Cette phrase, rapportée à Joyandet, est perçue par ce Sarkozyste historique comme un désaveu injuste. Joyandet considère qu'il n'a rien à se rapprocher : "Pas un euro public n'a été détourné pour mon enrichissement personnel ou celui de mes proches. L'homme d'honneur que je suis ne peut accepter d'être victime d'un amalgame ", plaide-t-il. Il prend donc la décision de démissionner, ce que Sarkozy refuse une première fois. Raphaëlle Bacqué raconte la suite : "Vendredi, après une ultime réunion destinée à préparer le défilé du 14 juillet, il annonce sa démission au président de la République. " Il n'en est pas question ! ", rétorque le chef de l'Etat. Ce dernier veut bien donner des gages à l'opinion. Mais il entend garder intacte sa capacité à recomposer un nouveau gouvernement à l'automne, un an et demi avant l'élection présidentielle. Orage. Tractations. Colère du président. En vain". L'annonce est prévue pour Dimanche.
C'est le Premier ministre qui va sceller le sort de Christian Blanc : François Fillon n'a pas supporté la polémique sur les 12 000 euros de cigares de son secrétaire d'Etat, encore moins sa défense puisque Blanc n'a pas souhaité remboursé tout de suite la note. Selon Le Monde, "la lecture, dimanche, des propos du chef de cabinet de M. Blanc s'insurgeant dans Le Parisien contre son ancien patron va achever d'exaspérer le premier ministre. En fin d'après-midi, c'est lui qui a convaincu le chef de l'Etat qu'il fallait profiter de la volonté de Joyandet d'en finir pour renvoyer, avec lui, le secrétaire d'Etat au Grand Paris".
On est donc loin d'un stratagème pensé et réfléchi depuis l'Elysée. Ce qui n'est pas forcément plus rassurant pour un chef d'Etat qui semble ne plus avoir de prise sur les événements.
Page Lue dans Le Monde, 6 juillet 2010
- Qu'est-ce qu'un conflit d'intérêts ?
- Christian Blanc, portrait d'un secrétaire d'Etat dans la tourmente
- Comment Eric Woerth s'est retrouvé au coeur de l'affaire Bettencourt
- Après l'affaire du Falcon privé, le permis de construire litigieux du secrétaire d'Etat Joyandet
BONUS : Quand les amis de Joyandet achetaient tous les numéros du Canard enchaîné pour étouffer l'affaire
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Quiz : Jacques Chirac n'a démissionné qu'une seule fois d'un poste ministériel. En quelle année ?