Quelles sont les vraies raisons de la réforme des retraites ?

Questions d'actualité · 7 sep. 2010 à 23:50

Réforme des retraites

Nicolas Sarkozy veut faire des retraites la principale réforme de son quinquennat. Pourtant, elle ne figurait pas dans son programme. Pour quelles raisons a-t-il décidé de s'attaquer à une réforme forcément impopulaire, à deux ans de la présidentielle ?

Pour justifier une réforme qu'il juge indispensable et nécessaire, le gouvernement répète à l'envi que l'espérance de vie augmente chaque année et que par conséquent, l'âge minimum pour jouir de sa retraire doit être avancé. Le système par répartition, tel qu'il est prévu actuellement ne serait plus pertinent. Des solutions s'imposeraient donc.


Toutefois, il semblerait que le gouvernement ne donne pas les véritables raisons qui ont poussé à cette réforme dont le projet de loi est débattu à l'Assemblée nationale depuis ce mardi 7 septembre 2010.

Les principales mesures de la réforme

À l'heure actuelle, l'âge légal de départ à la retraite est de 60 ans et le nombre de cotisation nécessaire pour avoir une retraite à taux plein est de 160 trimestres. La réforme prévoit le passage à la retraite à 62 ans. Grâce à cette mesure, l'État devrait économiser 20 milliards d'euros en 2020 ce qui comblerait, selon Libération, 50% du déficit du régime des retraites.
La réforme prévoit également un alignement sur dix ans du taux de cotisation des retraites des fonctionnaires (7,85%) sur celui du privé (10,55%). L'État espère que cette mesure lui rapportera 5 milliards d'euros en 2020. Enfin, le patronat devra annualiser ses exonérations de charges, ce qui permettra à l'État de récolter deux milliards d'euros.

La raison officielle du report de l'âge légal : un trou de 30 milliards dès 2010

Pour justifier sa réforme, le gouvernement s'est appuyé sur le huitième rapport du Conseil d'Orientation des Retraites (COR), remis le 14 avril 2010, qui [url=http://www.liberation.fr/economie/0101630116-les-retraites-creusent-leur-trou ]estime[/url] qu'« en l'absence de toute réforme, le déficit du système devrait atteindre entre 40 et 49 milliards d'euros en 2020, contre 24,8 milliards lors de la dernière estimation réalisée en 2007 ».
Pire, « le déficit atteindrait dès cette année, tous régimes confondus, 32,2 milliards d'euros », soit 1,7% du PIB. Or, dans son précédent rapport, le COR avait estimé que la France atteindrait ce déficit en 2030 seulement. Le COR va jusqu'à suggérer que le déficit pourrait atteindre 100 milliards d'euros d'ici 2050. Face à ces chiffres alarmistes, le gouvernement a donc décrété l'urgence d'une réforme nécessaire en raison de la hausse de l'espérance de vie. Puisqu'on vit plus longtemps, il est logique que le départ à la retraite soit repoussé.

Une dégradation des comptes liée d'abord à la hausse du taux de chômage

Contrairement à ce que dit le gouvernement en avançant l'argument démographique, la dégradation soudaine des comptes des caisses de retraite est avant tout liée au chômage. L'explosion du chômage (9,6% en 2009, record depuis 1997) est la première cause de ce déficit, puisqu'il y a moins de cotisants pour alimenter les caisses de retraite. S'il est vrai que l'espérance de vie augmente, force est de constater que le taux de chômage des seniors est également particulièrement élevé. Il ne suffit donc pas de vouloir que les seniors travaillent plus longtemps, encore faut-il qu'ils aient un emploi. Selon l'INSEE, les deux tiers des travailleurs partent à la retraite trois à quatre ans avant l'âge légal.

La vraie raison : résorber le déficit public et éviter que la France perde sa note AAA

En réalité, la réforme des retraites et le recul de l'âge légal à 62 ans ont été décidés dans la précipitation à cause de la crise financière et de la pression des agences de notation. Pour être crédible sur les marchés financiers, la France doit réduire son déficit public et donc trouver des solutions pour faire des économies immédiates afin de conserver sa note AAA et continuer à pouvoir emprunter.
Avantage du report de l'âge légal du départ en retraite : l'État perçoit des cotisations supplémentaires et repousse le paiement des pensions. Sarkozy s'est donc décidé à faire cette réforme impopulaire de façon subite pour éviter la catastrophe grecque. Mais d'autres mesures, d'ordre fiscal notamment, en taxant les hauts revenus et le capital, auraient pu être envisagées.


Par Anne-Sophie Demonchy

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