Enquête · 21 jan. 2011 à 08:50
Le temps des petits maires travaillant pour une bouchée de pain au service de la commune rurale est quasiment révolu. Désormais, un maire d'un bourg peut gagner autant qu'un cadre supérieur sans voir sa charge de travail véritablement augmentée. Par quel coup de baguette magique ? L'intercommunalité. Illustration dans les Bouches-du-Rhône.
A l'occasion de la sortie du livre de Vincent Quivy, Chers élus, ce qu'ils gagnent vraiment (Seuil), nous publions une série de 20 questions insolites sur les revenus des élus locaux et nationaux. Exemples : comment obtenir 600 000 euros de parachute doré en étant simple directeur de société d'économie mixte ? Comment un député peut-il devenir propriétaire sans dépenser le moindre euro ? Pourquoi est-il si difficile de connaître le salaire exact d'un ministre ?
Episode 3 : Le jackpot de l'intercommunalité
Face à l'éparpillement du territoire en petites communes, l'Etat a décidé de les regrouper afin de rationaliser l'aménagement du territoire et faciliter les projets locaux impliquant plusieurs villes. Si l'idée est bonne, son application s'est avérée aberrante. Au lieu de regrouper des communes, supprimer des échelons pour simplifier le découpage administratif, l'Etat a décidé... de rajouter un échelon supplémentaire, la communauté de commune. Pourquoi une telle décision ? Parce que les partis politiques ne peuvent se couper de la force de tous les petits élus locaux, il valait donc mieux ne pas les mécontenter. Voilà pourquoi la simplification du maillage administratif passa par la création d'une structure supplémentaire.
Désormais, les communes peuvent se regrouper en communauté de communes comme bon leur semble : à deux, à quatre, à six, peu importe. Aujourd'hui, selon Vincent Quivy, 91% des communes appartiennent à une communauté. Et qui gère ces nouvelles structures ? Les maires ! Sauf que ce qu'ils faisaient avant dans le cadre de leur travail de maire (des projets communs avec les autres communes), ils le font désormais dans le cadre d'une vice-présidence de la communauté de commune. En clair, c'est le même travail qu'auparavant, sauf que le maire perçoit désormais une deuxième indemnité !
Pour bien comprendre le gouffre financier de l'intercommunalité et le gain inespéré pour les élus locaux, Vincent Quivy a pris l'exemple du maire de Ceyreste, bourg de 4000 habitants situé dans les Bouches-du-Rhône. En tant que maire, l'élu gagnait 2057 euros par mois, indemnité fixée par le conseil municipal. Pour la gestion d'une commune rurale de cette taille, le montant de cette indemnité était le plafond maximal fixé par la loi. Alors comment le maire a-t-il réussi à doubler son salaire ? Par la magie de l'intercommunalité comme l'a expliqué Vincent Quivy : "en intégrant une communauté de communes, et non des moindres, la communauté urbaine de Marseille, "Marseille-Provence-Métropole", dont il a été nommé cinquième vice-président, ce petit maire a plus que doublé son salaire (2 700 euros supplémentaires) et obtenir une rémunération supérieure à 4 700 euros brut par mois. Un salaire de cadre pour gérer un bourg rural qu'autrefois les édiles dirigeaient pour quasi rien".
Vous l'aurez compris, l'intercommunalité, c'est donc faire la même chose qu'avant, en étant payé deux fois plus. Pas mal, non ?
Épisodes précédents
- Comment calculer les revenus de votre maire ?
- Les maires peuvent-ils bénéficier de "frais de représentation" ?
BONUS : Un élu local d'une commune de 6 000 habitants peut toucher 7 000 euros par mois
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L'argent du pouvoir : Les 20 épisodes de la saison 1
L'argent du pouvoir : Les 14 épisodes de la saison 2