Revue de presse · 9 fév. 2011 à 08:50
Le Canard enchaîné a compris pourquoi le Premier ministre François Fillon a regardé ses chaussures le 2 février dernier quand Alliot-Marie tentait de s'expliquer à l'Assemblée nationale sur son escapade tunisien pendant les fêtes de fin d'année : Fillon lui-même devait se douter que la presse allait révéler les conditions de son propre voyage en Egypte pendant les vacances de Noël.
Le scoop, qui tourne en boucle de médias en médias depuis hier soir, est à lire dans Le Canard enchaîné de ce mercredi 9 février 2011 : "le Premier ministre et da famille ont visité Abou-Simbel (Egypte) à Noël grâce à l'avion gentiment prêté par le raïs". De cette escapade, on ne savait rien ou presque : Fillon a eu un entretien avec Moubarak le 30 décembre et deux jours plus tard, un communiqué de Matignon avait précisé que le Premier ministre s'était rendu dans la cathédrale d'Assouan pour "exprimer sa solidarité à l'égard de la communauté copte" qui venait d'être victime d'un attentat à Alexandrie
Voilà pour la version officielle. Mais pour les détails du réveillon, il faut lire Le Canard enchaîné.
D'après Le Canard, "dès son arrivée en Egypte, l'auguste touriste et sa tribu [sa femme et ses enfants] ont pris leurs quartiers, à l'abri des regards, dans une maison privée dépendant de l'hôtel Movenpick, sur l'Ile Eléphantine. L'endroit est idéal pour quelques excursions dans les environs. Notamment au temple d'Abou-Simbel, à 280 km au sud d'Assouan. On peut s'y rendre soit par la route (éprouvant), soit en bateau (un peu long), soit en avion. Plusieurs compagnies aériennes font la navette, à longueur de journée, pour un prix moyen de 250 euros aller et retour. Mais un avion privé, c'est plus chic. Surtout l'un des jets du raïs. Matignon a confirmé au Canard que la petite famille avait embarqué à l'invitation du Président pour une visite privée du site, envahi, pour l'occasion, par des forces de sécurité".
Certes, à l'époque, il n'y avait pas encore d'émeutes en Egypte. Mais les révélations de cette escapade tombent plutôt mal en pleine affaire du jet privé d'Alliot-Marie en Tunisie.
L'autre affaire dans l'affaire, c'est l'utilisation par François Fillon d'un avion de l'Etec (l'escadron gouvernemental) pour ses vacances en Egypte. Le Premier ministre a voyagé à bord d'un Falcon 900 affrété expressément pour son voyage, officiellement "pour des raisons de sécurité et de disponibilité". Matignon a confirmé l'information tout en précisant que le Premier ministre a payé une partie des frais : "les billets ont été facturés au tarif fixé par l'armée de l'air, proche de celui des avions de ligne". Et Le Canard d'ironiser : "pour un jet privé, c'est donné. Surtout que la facture, elle, est plutôt salée. L'heure de vol d'un Falcon 900 coûte 9 400 euros à l'Etat. A quoi il faut ajouter le prix du stationnement sur le tarmac d'Assouan, plus l'entretien et le séjour de tout l'équipage. L'avion est resté immobilisé pendant dix jours, et tout ce petit monde, remarqué par d'autres visiteurs pour sa bonne humeur, était logé non loin de la famille Fillon, à l'hôtel cinq étoiles Pyramisa". Tous ces frais ont été payés... par l'Etat français.
Source : Brigitte Rossigneux, "Fillon en goguette dans le jet de Moubarak", Le Canard enchaîné n°4711, 9 février 2011, page 3