Débat du second tour : pourquoi Sarkozy n'a-t-il pas interrompu Hollande pendant sa tirade "Moi, président de la République" ?

Vidéos · 4 mai 2012 à 10:21 · Commentaires 0

Anaphore de François Hollande

Un mystère. Pourquoi Sarkozy n'a-t-il pas interrompu Hollande pendant son réquisitoire "Moi, président de la République ?" Pendant plus de trois minutes, le candidat socialiste a pu dérouler son texte, rappeler notamment que Sarkozy s'était rendu dans un hôtel chic pour collecter des dons pour l'UMP. Et Sarkozy n'a pas bougé.

Il pouvait pourtant facilement l'interrompre, lui faire remarquer qu'il n'est pas encore président, ironiser sur un texte qui semblait appris par cœur, sur le tacler sur le monopole de la parole à l'image du monopole du cœur. Mais Sarkozy n'a rien dit :

L'attitude de Nicolas Sarkozy a étonné tous les commentateurs. "Le plus surprenant dans cet épisode du débat est que Nicolas Sarkozy ne l'ait pas interrompu, remarque par exemple le directeur éditorial du Monde, Gérard Courtois. Il m'a donné à ce moment-là le sentiment d'avoir baissé les bras, et de ne plus se protéger contre les coups percutants, voire brutaux, que lui assénait M. Hollande".

"M. Sarkozy aurait pu l'interrompre en disant qu'il ne l'était pas encore, ou en pointant son arrogance. Au contraire, il s'est tu. Il a laissé le candidat socialiste à sa litanie, et on se demande, à ce moment du débat, s'il ne s'est pas déjà résigné à la transmission du flambeau : c'était très étonnant venant de sa part", estime l'éditorialiste du Monde, Françoise Fressoz.

"Cette anaphore a été un point fort du débat, et il est assez étonnant que Nicolas Sarkozy n'ait pas essayé d'interrompre Hollande dans sa dynamique, qu'il ne soit pas intervenu pour casser son effet. Notamment parce qu'il connaît très bien les ressorts de cette figure de style. Dans ces discours, sa plume, Henri Guaino, use et abuse de cette figure de style", explique Arnaud Mercier, chercheur en communication politique au CNRS et à l'université de Metz.

Même François Hollande a reconnu deux jours plus tard, sur Canal +, qu'il s'attendait à ce que Sarkozy le coupe : "Au bout de la dixième fois, je pense que Nicolas Sarkozy va m'interrompre et il ne le fait pas. J'aurai pu continuer longtemps j'en avais ! Il attendait que ça s'arrête et ça ne s'arrêtait pas, dans ses yeux je lisais 'mais quand est-ce que ça va s'arrêter', je pensais que c'est une information qui échappait aux Français !"

Le candidat socialiste a donc réussi son coup, qui n'était pas prémédité selon lui : "Un débat se prépare, bien sûr. Parfois, on cherche une phrase. Et puis, un moment, dans le débat, il y a une comme une évidence qui s'impose (...). Je savais que j'allais parler de la moralisation de la vie politique (...). J'avais les idées, mais c'est la forme qui m'est venue dans le débat", a-t-il expliqué le lendemain du débat sur France inter.


*** Sources :
- "Moi président de la République : Hollande pensait que Sarkozy l'interromprait", Lemonde.fr, 04/05/2012
- Alexandre Lemarié, "Moi président... La tirade de Hollande qui agace le camp Sarkozy", Lemonde.fr, 03/05/2012
- Gérard Courtois, "Sarkozy n'a pas pu éviter le réquisitoire sur son bilan", Lemonde.fr, 03/05/2012
- Michaël Szadkowski, "Hollande partait en position de favori, il le reste", Lemonde.fr, 03/05/2012
- Hélène Favier, "On peut se casser les dents sur un flanby", Europe1.fr, 03/05/2012

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