L'argent du pouvoir · 18 sep. 2013 à 09:20 · 0
Son compte en Suisse ne lui suffisait pas. "Comme député, Jérôme Cahuzac aurait fait un usage parfois abusif de son « indemnité de frais de mandat » (IRFM), cette fameuse enveloppe de 5 770 euros mensuels allouée à tous les parlementaires pour couvrir leurs frais professionnels, versée sur un compte à part, mais trop souvent détournée à des fins privées", révèle le site Mediapart.
C'est une note de Tracfin, rédigée au lendemain des aveux de Jérôme Cahuzac, qui a alerté le ministère de l'Economie. Après avoir analysé les mouvements de son compte BNP-Paribas sur lequel était versé son indemnité IRFM, Tracfin (l'organisme chargé de lutter contre le blanchiment d'argent) a découvert des dépenses "sans lien apparent avec l'exercice d'un mandat parlementaire : des emplettes dans des « magasins d'habillement de luxe », des « abonnements à Canalsatellite et Canal Plus », ou même une note de 8 000 euros réglée chez un vendeur de piscines et hammams du Lot-et-Garonne (l'ancienne circonscription du socialiste)", indique Mediapart.
Les auteurs de la note, qui ont analysé les mouvements bancaires des six derniers mois de sa mandature (janvier-juin 2012) précisent toutefois que l'ancien député avait aussi versé sur ce compte professionnel une partie de ses indemnités de maire (9 100 euros en six mois) qui pouvaient couvrir tous ses achats. Vu la confusion des genres, Cahuzac a-t-il effectué d'autres dépenses personnelles pendant toutes ses années de député ? Selon Mediapart, en raison de l'absence de contrôle de l'utilisation de l'IRFM par l'Assemblée, "les risques encourus par Jérôme Cahuzac sur le plan juridique étaient probablement trop minces pour que Tracfin juge utile de passer les cinq années de sa mandature au peigne fin". On ne saura donc jamais.
Le problème de l'utilisation de cette indemnité n'est pas nouveau. Dans un livre publié en 2010, le journaliste Vincent Quivy avait raconté comment des députés devenaient prioritaires de leurs permanences électorales (souvent un appartement) en piochant dans cette cagnotte. Plus récemment, Mediapart avait révélé qu'un député socialiste avait utilisé son indemnité de frais de mandat pour financer des vacances en Egypte.
Malgré ces affaires, l'Assemblée nationale continue de fermer les yeux. Pourtant, une solution simple existe : il suffirait, comme en Angleterre, d'exiger les factures de chaque dépense pour éviter les abus. Mais un tel dispositif n'est toujours pas à l'ordre du jour. On se demande bien pourquoi...
** Source
- Mathilde Mathieu, "Cahuzac utilisait son compte de député pour des dépenses personnelles", Mediapart, 17.09.2013
_____________________________________________________