Revue de presse · 5 mar. 2014 à 09:26 · 0
Pas de pièces justificatives, des fonds publics distribués de manière "totalement discrétionnaire" pour les enquêtes... et pour les cabinets. Le rapport de la Cour des comptes, relayé par Mediapart, ne cesse d'étonner sur l'utilisation de ce qu'on appelle des "frais d'enquête et surveillance" (FES). En clair, de l'argent liquide distribuée aux policiers pour le besoin de leurs enquêtes. D'après le rapport de la Cour des comptes, entre 2002 et 2012, 129 millions d'euros en argent liquide ont ainsi été distribués.
Et cet argent n'était pas seulement utilisé pour les enquêtes : l'affaire Guéant a prouvé qu'entre 2002 et 2004, celui qui était directeur de cabinet du ministère de l'Intérieur a reçu 10 000 euros par mois en liquide, qu'il redistribuait à une partie du cabinet de Nicolas Sarkozy. La pratique était même plus large que ce qu'on pressentait : selon la Cour des comptes, ce sont 34 millions d'euros qui ont été distribués, en liquide, au cabinet du patron de la police entre 2002 et 2012. Des sommes attribuées de façon "totalement discrétionnaire" et sans pièces justificatives jusqu'en 2011.
"Les personnes désignées pour prendre possession des espèces sont des directeurs et chefs de services centraux, et non les policiers auxquels elles sont destinées. Avant de leur parvenir, l'argent liquide transite entre les mains d'une longue chaîne d'intervenants, gestionnaires centraux et responsables territoriaux. [Ce qui occasionne] l'accumulation, en toute opacité, d'importants reliquats de fonds en liquide au cabinet du DGPN (directeur général de la police nationale) ainsi qu'au niveau des directeurs centraux et de leurs responsables territoriaux", constatent les magistrats de la Cour des comptes.
D'après Mediapart, ces sommes destinées aux "enquêtes" étaient en fait utilisées "pour tout et n'importe quoi" : "primes, frais de représentation des chefs de services, organisation de moments de convivialité, remboursements de frais de déplacement, défraiements de boissons et de repas lors de planques, rémunération d'indics. Dans le plus grand flou comptable : hormis la rémunération des informateurs, encadrée par la loi depuis 2008, il n'a pas été établi de compte d'emploi de ces sommes en liquide entre 2002 et 2012".
Une réforme globale est en cours. En 2013, le robinet à argent liquide a fortement diminué... avec une distribution de 4,2 millions d'euros tout de même.
*** Sources
- "La gestion des frais d'enquête et de surveillance dans la police nationale", Ccomptes.fr, 04.03.2014
- Louise Fessard, "Frais d'enquête: 34 millions d'euros pour le cabinet du patron de la police en dix ans", Mediapart, 04.03.2014
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