#10ans après : Jean-Marie Le Pen, un "milliardaire" toujours persécuté par le fisc

Revue de presse · 4 jan. 2017 à 16:29 · Commentaires 0

Fortune de Jean-Marie Le Pen

A l'occasion des 10 ans de Politique.net, nous vous proposons un making of des principales enquêtes publiées sur le site.

Episode 1 : La fortune de Jean-Marie Le Pen

10 ans après la création de Politique.net, certains articles publiés la première année continuent à être très consultés et à circuler de temps en temps sur les réseaux sociaux. C'est le cas de notre article intitulé : "Enquête sur la fortune de Jean-Marie Le Pen : le leader du FN contourne l'ISF".

A l'époque, nous avions relayé une enquête du Canard enchaîné publiée en mars 2007, pendant la campagne présidentielle. La fortune de Jean-Marie Le Pen provient principalement d'un héritage reçu dans les années 1970 par un certain Hubert Lambert, lui-même héritier en partie de la dynastie des ciments Lambert. Le Pen a perçu à l'époque 30 millions de francs... et est devenu propriétaire du manoir de Montretout à Saint-Cloud, une demeure gigantesque à l'Ouest de Paris (430 m² et deux dépendances). Quand Le Pen en devient propriétaire, à la fin des années 1970, la maison était estimée à quelques dizaines de millions de francs. En 2007, selon Le Canard enchaîné, elle vaut 6,45 millions d'euros ! En plus de cet héritage et du manoir, Le Pen possédait en 2007 une maison familiale à la Trinité-sur-Mer (1 million d'euros) et 50% des parts d'une marque de champagne.

Si l'article du Canard enchaîné rappelait le patrimoine de Le Pen, c'était surtout pour insister sur ses ennuis avec le fisc. Avec un titre bien accrocheur : "Le Pen, un milliardaire persécuté par le fisc".

Le Pen Canard enchaîné 2007


En réalité, c'est un milliardaire de centimes, sa fortune étant plutôt estimé en millions d'euros. En 25 ans, Le Pen a subi plusieurs redressements fiscaux, tous liés au fait que le manoir appartient à une société civile immobilière (SCI) et qu'il la déduisait de son calcul de l'ISF.

10 ans après : 4 redressements fiscaux, des enquêtes et près de 400 000 euros réclamés

Lorsque nous publions l'article en décembre 2007, Twitter commençait tout doucement, Facebook n'avait que trois ans. C'est sans doute ce qui explique que l'article du Canard enchaîné ait autant été relayé... par mail. 10 ans après, le paysage médiatique a bien changé : Mediapart a publié de nombreuses enquêtes sur l'argent du Front national et de Le Pen (ici et par exemple) et les sites de presse ont suivi de près le feuilleton fiscal de Le Pen (Le Monde et Le JDD notamment).

Et 10 ans après, Jean-Marie Le Pen est toujours un "millionnaire" persécuté par le fisc, pour reprendre le titre du Canard 2007. En décembre 2015, il a reçu quatre assignations pour une ardoise totale... de près de 400 000 euros. "Je n'en paierais évidemment pas un centime, tout cela est abusif! N'étant plus candidat à rien, je suis une victime collatérale! À travers moi, on veut atteindre quelqu'un d'autre", avait réagi Le Pen auprès du JDD. L'autre, c'est sa fille.

Le premier redressement fiscal concerne ses revenus de député européen non déclarés au fisc français, qui lui réclame aujourd'hui plus de 21 000 euros. Le deuxième redressement fiscal est lié à son ISF : il aurait oublié de déclarer certains biens taxables. Le troisième redressement fiscal est lié à un signalement de Tracfin, la cellule anti-blanchiment de Bercy. Le Pen a reçu un virement de 324 240 euros d'un compte en Suisse détenu par sa femme. Pour cette opération, que Le Pen estime légale, le fisc réclame la modique somme de 279 504 euros. Le quatrième redressement fiscal porte sur sa déclaration de patrimoine et l'évaluation du domaine de Montretout. Le Pen aurait sous-déclaré le montant du manoir si bien que le fisc lui réclame 63 289 euros de droits d'enregistrement. Au total, l'ardoise fiscale s'élève donc à 368 382 euros.

Visé par une plainte pour "fraude fiscale aggravée, blanchiment aggravé de fraude fiscale aggravée et de déclarations inexactes à la Commission pour la transparence de la vie politique et à la HATVP", Le Pen a fait l'objet d'une perquisition dans ses différents logements en novembre 2015. Six coffres forts ont été ouverts, et 29 louis d'or ont été saisis. Ayant toujours le sens du spectacle, Le Pen a diffusé sur Twitter la photo d'un vieux coffre Napoléon III "légèrement" forcé par les policiers.

Coffre fort

Le parlement de Strasbourg lui réclame également 320 000 euros

Et ce n'est pas tout : dans le cadre de l'affaire des assistants parlementaires, le parlement européen réclame à Jean-Marie Le Pen le remboursement de près de 320 000 euros. Selon l'enquête menée par le parlement européen de Strasbourg, une quarantaine d'assistants parlementaires du FN auraient bénéficié d'emplois fictifs. Ce que conteste Le Pen.

10 ans après l'article du Canard enchaîné, la fortune de Jean-Marie Le Pen et ses démêlés avec le fisc et la justice sont donc largement couverts par la presse. Agé de 87 ans, Le Pen espère sans doute ne jamais avoir à payer ces sommes et continue de jouer, par le biais de son micro-parti Cotelec, un rôle financier déterminant au FN : en septembre 2016, il a accepté de financer la campagne présidentielle de sa fille...


*** Sources
- Hervé Martin, Le Pen entre bonnes fortunes et fraude fiscale, Le Canard Enchaîné n°4508, 21.03.2007
- Laurent Valdiguié, "Les louis d'or de Jean-Marie le Pen", Le JDD, 08.11.2015
- Laurent Valdiguié, "Le crépuscule de Jean-Marie Le Pen", Le JDD, 03.04.2016
- Marine Turchi, "Argent du FN et des Le Pen: une famille aux affaires", Mediapart, 05.04.2016
- Valérie Hacot, "Présidentielle 2017 : Marine Le Pen aura les sous de papa", Le Parisien, 12.09.2016
- Marine Turchi, "Le Parlement européen réclame près de 300.000 euros à Marine Le Pen", Mediapart, 12.12.2016



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