Fact-checking · 6 sep. 2019 à 08:00 · 0
Vous pouvez écrire sur internet ce que vous voulez. Invité de l'émission C à vous sur France 5 le 3 septembre, François de Rugy a fustigé une petite entreprise qui est dans l'impunité la plus totale, sans la nommer. Comme si Mediapart n'était pas un site d'information reconnu, obéissant à des règles déontologiques. Car c'est bien connu, on publie n'importe quoi sur internet.
Son attaque contre Mediapart est intervenue 24h après la publication d'un nouvel article du site d'information, dénonçant les mensonges répétés de l'ancien ministre. Un article précis, sérieux, bien étayé, qui déconstruit patiemment l'argumentaire de l'ancien ministre. Un travail journalistique irréprochable... que nous allons vous faire partager afin qu'internet ne soit pas, comme l'affirme de Rugy, un espace où l'on publie n'importe quoi.
Mediapart a accusé François de Rugy d'avoir organisé des dîners fastueux à l'hôtel de Lassay lorsqu'il était président de l'Assemblée nationale. Des dîners qui n'avaient rien de professionnels.
Après sa démission, l'ancien ministre a pourtant fait le tour des plateaux télés et des radios pour affirmer qu'il avait été blanchi par un rapport de l'Assemblée nationale. Ce rapport dirait “noir sur blanc que les dîners à l'Assemblée étaient des dîners professionnels, qui rentreraient dans le cadre de [ses] fonctions” a-t-il déclaré sur BFMTV le 29 juillet. Sauf que c'est faux, comme le démontre Mediapart : “Bien que très complaisant parce que réalisé par son ancien subordonné, le rapport de l'Assemblée a tout de même épinglé trois des douze dîners mis en cause : le repas de Noël 2017, la soirée de la St Valentin 2018, et un troisième dîner sans « thème de discussion »”, explique le site d'information. De Rugy a d'ailleurs promis de rembourser les frais incombant à ces trois dîners. Il est donc faux de dire que le rapport de l'Assemblée l'a “blanchi”.
S'agissant du dîner de la St Valentin, De Rugy a d'ailleurs apporté une excuse bidon sur BFMTV, en expliquant qu'il avait dîné à l'hôtel de Lassay, et non au restaurant avec sa femme, parce qu'il se trouvait “entre deux séances” parlementaires, “l'après-midi, le soir”. Or, c'est faux, comme l'a précisé l'AFP : le 14 février 2018, la séance a non seulement été levée à 19h20 mais De Rugy l'a quittée bien avant, à 16h10, selon le compte-rendu de séance.
Quant aux neuf autres dîners épinglés par Mediapart, le rapport de l'Assemblée estime qu'ils ne posaient “pas de difficulté particulière” et “ne sauraient être qualifiés de privés”. Des conclusions que conteste Mediapart. Plusieurs participants ont reconnu que ces dîners n'avaient rien de professionnels. Parmi eux figure notamment l'éditorialiste Jean-Michel Aphatie. Auprès du Point et de Paris Match, Séverine de Rugy elle-même a reconnu que les photos qui avaient circulé avaient été prises par des “amies”, “des amitiés vieilles de plus de quinze ans”.
Preuve qu'il y'a eu des manquements dans l'organisation de ces dîners : le successeur de François de Rugy au perchoir de l'Assemblée, Richard Ferrand, a annoncé cet été la création d'un groupe de travail pour renforcer “les règles et procédures de la Présidence”.
*** Sources
- Interview de François de Rugy face à Apolline de Malherbe, BFMTV, 29.07.2019
- Extrait de l'interview de François de Rugy sur France 5, Twitter, 03.09.2019
- Rémi Banet, “De Rugy “entre deux séances” le soir de la Saint-Valentin 2018 ? Il avait quitté le perchoir à 16h10”, AFP Factuel, 30.07.2019
- Fabrice Arfi, Michaël Hadjenberg, Antton Rouget et Marine Turchi, « Affaire Rugy : un été d'intox », Mediapart, 03.09.2019
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